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Échange stratégique

La vérité sur cinq mythes concernant les taux de change

21 juin 2023 par Peter Muldowney

Piles de pièces assises sur un fond de graphique financier.

Les investisseurs institutionnels sont souvent confrontés à la décision de protéger ou non leurs placements étrangers contre les fluctuations des taux de change. La vigueur ou la faiblesse d’une devise par rapport à une autre, comme le dollar canadien par rapport au dollar américain, est une préoccupation courante. Plusieurs mythes concernant les devises peuvent influencer les décisions de placement.

Mythe 1 – Les fluctuations des taux de change ont le même effet sur toutes les sociétés.

Bien que la majorité des sociétés des marchés boursiers mondiaux payent des coûts et génèrent des revenus dans différentes devises, les fluctuations des taux change n’ont pas la même incidence dans tous les cas. Les sociétés des marchés boursiers mondiaux peuvent être réparties en quatre grandes catégories.

Multinationales Ressources naturelles Exportateurs Centrées sur le marché intérieur
Coca-Cola Shell Nissan Itau
Unilever AngloGold Ashanti Swatch Unibanco
Multinationales Coca-Cola Unilever
Ressources naturelles Shell AngloGold Ashanti
Exportateurs Nissan Swatch
Centrées sur le marché intérieur Itau Unibanco
 

Dans la catégorie la plus importante, les sociétés multinationales, les coûts et les revenus sont exprimés dans plusieurs devises. Les fluctuations du taux de change de la monnaie nationale auront donc une incidence sur le rendement et la volatilité des sociétés individuelles.

Dans le cas des entreprises liées aux ressources naturelles, comme celle des secteurs de l’énergie et des mines, le facteur qui a le plus d’effet sur le rendement et la volatilité est la variation du prix du produit de base qu’elles exploitent.

Les exportateurs génèrent la plus grande partie de leur chiffre d’affaires à l’étranger, par conséquent, la faiblesse de la monnaie nationale peut être avantageuse, parce qu’elle rend leurs produits plus concurrentiels, tandis qu’une monnaie forte peut avoir l’effet inverse.

Les entreprises centrées sur leur marché intérieur œuvrent principalement sur leur marché national, donc, les fluctuations des taux de change ont une faible incidence sur le rendement et la volatilité.

Mythe 2 – Les gestionnaires de placement s’occupent de gérer le risque de change.

Les méthodes de gestion des taux de change varient selon le style et le processus de chaque gestionnaire de placement. En règle générale, la première considération est propre au titre : les entreprises sont classées en grandes catégories, comme cela est décrit dans le Mythe 1, afin d’évaluer comment chaque société gère les répercussions des taux de change sur ses activités, ce qui permet au gestionnaire de placement de déterminer le risque de change « réel » de chaque société.

Les gestionnaires de placement qui privilégient une approche fondamentale analysent la surpondération de certaines devises résultant du processus de sélection d’actions et de répartition sectorielle, afin de déterminer si une couverture est nécessaire pour se rapprocher de la répartition de l’indice de référence. Cette analyse n’entraîne pas toujours l’adoption d’une couverture.

En revanche, les gestionnaires systématiques (quantitatifs) perçoivent souvent une exposition au risque de change différente de celle de l’indice de référence comme un risque non compensé et les différences de change engendrées par le processus de sélection des titres sont couvertes, afin qu’elles aient un effet globalement neutre par rapport à l’indice de référence, après avoir examiné les coûts associés à la couverture.

Mythe 3 – Les actions mondiales sont plus volatiles que les actions canadiennes.

Sur des périodes plus courtes (p. ex., périodes mobiles de trois ans), le rendement des actions mondiales a généralement été moins volatil que celui des actions canadiennes, malgré l’exposition au risque de change. Toutefois, sur de courtes périodes, les actions mondiales peuvent être plus volatiles. La figure 1 présente la volatilité relative des rendements des actions canadiennes (représentées par l’indice S&P/TSX) sur des périodes mobiles de trois ans par rapport aux actions mondiales (représentées par l’indice MSCI Monde non couvert). Lorsque la courbe de volatilité dépasse la ligne horizontale de 0 %, cela indique que les actions canadiennes ont été plus volatiles. À l’inverse, lorsque la courbe de volatilité descend en dessous de la ligne horizontale, cela indique que les actions mondiales ont été plus volatiles. En général, les actions canadiennes ont été plus volatiles.

Figure 1 : Volatilité relative des actions canadiennes et mondiales

Source : Bloomberg and MSCI

Toutefois, l’analyse à long terme (rendements sur des périodes mobiles de 10 ans) montre que les actions mondiales ont été presque systématiquement moins volatiles que les actions canadiennes (figure 2), car les occasions de placement sont plus diversifiées.

Figure 2 : Volatilité des rendements absolus des actions canadiennes et mondiales

Source : Bloomberg and MSCI

Mythe 4 – Couvrir le risque de change réduit la volatilité des actions mondiales.

Comme les investisseurs institutionnels détiennent souvent des portefeuilles diversifiés comprenant des actions mondiales, l’exposition aux taux de change est un facteur important. Même si la couverture des taux de change est souvent perçue comme nécessaire pour réduire la volatilité, les recherches montrent que ce n’est peut-être pas toujours la meilleure approche. La figure 3 montre que la volatilité des rendements sur des périodes mobiles de trois ans a généralement été plus faible sans couverture des taux de change, surtout depuis le milieu des années 1990. Cela s’explique par le fait que les fluctuations des taux de change peuvent compenser les fluctuations du rendement, ce qui réduit la volatilité globale des placements. Lorsque la courbe de volatilité relative dépasse la ligne horizontale de 0 %, la couverture du taux de change des actions mondiales a réduit la volatilité du rendement. Sous la ligne horizontale de 0 %, les placements en actions mondiales non couverts ont produit des rendements moins volatils.

Ne pas couvrir le risque de change peut avoir des avantages, comme la capacité de tirer parti des fluctuations de change favorables. Toutefois, le risque de change peut aussi accroître le risque global d’un portefeuille et doit être surveillé et géré avec soin pour s’assurer qu’il demeure acceptable pour chaque investisseur.

Figure 3 : Actions mondiales couvertes et non couvertes

Source : Bloomberg and MSCI

Mythe 5 – Couvrir le risque de change à 50 % est la stratégie optimale.

Les recherches indiquent souvent qu’un ratio de couverture de 50 % est optimal. Toutefois, la décision de couvrir le risque de change dépend de l’investisseur et de sa perspective concernant le risque, ainsi que du risque de change d’un portefeuille. Par exemple, les stratégies de couverture doivent être adaptées au portefeuille de l’investisseur. La figure 4 montre que le niveau de couverture nécessaire dépend du risque de change total du portefeuille d’un investisseur. Les portefeuilles des investisseurs A et B ont une exposition nette de 30 % au risque de change, même s’ils ont des ratios de couverture très différents.

Figure 4 : Conséquences d’un ratio de couverture de 50 %

  Exposition au risque de change (a) Ratio de couverture (b) Net currency exposure (a-b)
Investisseur A 60 % 50 % 30 %
Investisseur B 30 % 0 % 30 %
  Investisseur A Investisseur B
Exposition au risque de change (a) 60 % 30 %
Ratio de couverture (b) 50 % 0 %
Exposition nette au risque de change (a-b) 30 % 30 %
 

Du point de vue du risque, un ratio de couverture de 50 % peut être recommandé pour gérer le « risque de regret », c’est-à-dire le regret qu’un investisseur éprouvera s’il décide de complètement couvrir ou de ne pas couvrir du tout le risque de change et que cette décision s’avère ne pas être la bonne.

La figure 5 compare le rendement des actions américaines non couvertes sur des périodes mobiles de trois ans moins le rendement des mêmes actions entièrement couvertes (ligne orange), ainsi que le rendement non couvert moins le rendement obtenu avec un ratio de couverture de 50 % (ligne verte). Lorsque le rendement relatif sur une période mobile de trois ans est au-dessus de la ligne horizontale de 0 %, la décision de ne pas couvrir le risque de change a permis d’enregistrer un meilleur rendement. Lorsque le rendement relatif est en dessous de la ligne horizontale, la décision de couvrir le risque de change a permis d’enregistrer un meilleur rendement.

Figure 5 : Regret lié à la gestion du risque de change

Source : Bloomberg and MSCI

La stratégie de couverture à 50 % visant à gérer le « risque de regret » minimise les rendements relatifs extrêmes, ce qui peut être avantageux pour certains investisseurs.

Dans un monde idéal, les investisseurs préféreraient une approche dynamique de la gestion des taux de change leur permettant de ne pas couvrir le risque de change lorsque le dollar canadien perd de la vigueur et de couvrir ce risque lorsque le dollar canadien prend de la vigueur.

Fixer des seuils qui déclencheront la couverture et son montant en fonction de la vigueur ou de la faiblesse relative de la devise pourrait être une option. La figure 6 ci-dessous donne un exemplede seuils pouvant être utilisés pour un portefeuille indiciel d’actions américaines.

Figure 6 : Seuils dynamiques

Taux de change ($ USD pour 1 $ CA) % d’actions américaines à couvrir
Supérieur à 0,90 $ 0 %
De 0,85 $ à 0,90 $ 20 %
De 0,75 $ à 0,85 $ 40 %
Inférieur à 0,75 $ 60 %
Taux de change
($ USD pour 1 $ CA)
% d’actions américaines à couvrir
Supérieur à 0,90 $ 0 %
De 0,85 $ à 0,90 $ 20 %
De 0,75 $ à 0,85 $ 40 %
Inférieur à 0,75 $ 60 %
 

Selon l’analyse du rendement relatif sur une période mobile de trois ans, la figure 7 montre la différence entre le rendement produit avec un ratio de couverture fixe de 50 % et celui produit avec une approche dynamique fondée sur des seuils. L’approche dynamique n’offre pas systématiquement un avantage et, en fait, la stratégie de couverture fixe a produit le meilleur rendement relatif, de 2005 à 2013. L’analyse ne tient pas compte du coût de la couverture. Étant donné que l’approche dynamique exige plus de temps et de surveillance, et qu’il faut des décennies pour produire un avantage significatif, il est probable qu’elle serait abandonnée au profit d’autres stratégies potentiellement plus rentables.

Figure 7 : Couverture fixe ou dynamique (rendements relatifs)

Source : Bloomberg and MSCI

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juin 21st, 2023