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Échange stratégique

Intelligence artificielle : la dernière GPT (mais pas celle à laquelle vous pensez)

12 juin 2025 par Peter Muldowney

Un homme d'affaires examine des données analytiques avec des images de projection d'IA futuristes provenant d'un ordinateur et d'une tablette.

L’intelligence artificielle (IA) représente les progrès technologiques qui permettent aux machines d’imiter le fonctionnement de notre cerveau, en s’inspirant de notre façon de recevoir les données, de résoudre des problèmes et de prendre des décisions. L’IA est reçue comme la plus récente technologie d’usage général (en anglais, general purpose technology ou GPT*), suivant la lignée d’innovations antérieures comme la machine à vapeur, l’électricité et la révolution des technologies de l’information et des communications (TIC). Cet article examine la façon dont l’IA devrait contribuer à la productivité économique et ses répercussions dans le monde de la gestion d’actifs.

Les technologies d’usage général et l’économie

Les avantages d’une technologie d’usage général sur le plan de la productivité économique se manifestent en trois phases :

  1. La phase initiale : Au cours de cette phase, la technologie est nouvelle et son adoption est limitée, ce qui se traduit par des avantages minimes.
  2. La phase de croissance : À mesure que la technologie s’améliore, les coûts de mise en œuvre diminuent et son usage se généralise, ce qui se traduit par d’importants gains de productivité.
  3. La phase de maturité : Le rythme des améliorations et des déploiements ralentit, ce qui entraîne une diminution graduelle des gains de productivité.

Dans le passé, il a fallu plusieurs décennies pour que les gains de productivité découlant d’une technologie d’usage général se matérialisent. Toutefois, l’IA devrait faire une différence plus rapidement en raison de sa nature logicielle, qui permet un déploiement rapide et efficace des progrès.

L’IA devrait avoir une incidence sur l’économie à plusieurs niveaux :

  • Économies d’efficacité : L’IA augmentera la productivité grâce à des économies d’efficacité ponctuelles, soit en maximisant les ressources existantes, soit en effectuant des tâches avec moins de ressources.
  • Collaboration entre l’humain et l’IA : Dans certains cas, l’IA remplacera les humains, tandis que dans d’autres, elle les aidera à être plus efficaces dans leur travail. Malgré les préoccupations liées à l’IA, 95 % des travailleurs reconnaissent sa valeur pour leur travail (en anglais).
  • Innovations complémentaires : Il est peu probable que les avantages de l’IA se concrétisent entièrement tant qu’il n’y aura pas d’innovations complémentaires, de manière analogue au rôle joué par le développement de navigateurs Web et de moteurs de recherche dans l’atteinte du plein potentiel de l’Internet.

PwC prévoit que le PIB mondial augmentera de 14 % en 2030 en raison de l’adoption de l’IA, soit l’équivalent d’un ajout de 15 700 milliards de dollars américains. Selon les prévisions, plus de la moitié des gains proviendront de l’amélioration de la productivité de la main-d’œuvre. Toutefois, les avantages économiques de l’IA ne seront pas répartis partout équitablement. Les États-Unis devraient en tirer des gains plus rapides et possiblement plus prononcés en raison de leurs investissements privés et publics substantiels dans la recherche et le développement en IA ainsi que de leur grand nombre d’entreprises en démarrage dans ce domaine.

L’IA et les actions

Les gestionnaires d’actions peuvent être classés dans deux grands styles : fondamentaux et systématiques (quantitatifs). Les gestionnaires adoptant des stratégies fondamentales effectuent des recherches approfondies sur des sociétés individuelles, parfois au moyen d’outils d’IA pour agrémenter leur analyse. En revanche, les gestionnaires systématiques préconisent depuis longtemps l’utilisation de la technologie, se servant de modèles informatisés dont l’analyse englobe un vaste univers d’actions.

Par exemple, les progrès technologiques ont permis à l’équipe de stratégies quantitatives d’actions de Gestion de placements Connor, Clark & Lunn d’améliorer son processus de placement grâce à une puissance informatique accrue et à une plus grande disponibilité des données. Ceci a poussé l’équipe à valoriser autant sa philosophie de placement que sa philosophie technologique, une approche qui se traduit par une étroite collaboration entre les gestionnaires de portefeuille, les professionnels de l’apprentissage automatique et d’autres professionnels de l’informatique dans un environnement entièrement symbiotique.

À mesure que les ordinateurs sont devenus plus intelligents et plus rapides, la portée de l’analyse s’est élargie. L’équipe est passée de l’utilisation de plusieurs machines rapides distinctes à un grand réseau interne pour l’informatique parallèle, situé à la fois dans ses bureaux et dans le nuage, ce qui lui permet d’accéder à des milliers d’unités centrales de traitement sur demande de manière rentable.

Les données ont toujours été au cœur de la gestion des placements en actions. Aujourd’hui, l’équipe peut utiliser beaucoup plus de données en raison de la complexité accrue des algorithmes. Le défi pour tous les gestionnaires d’actifs est de réduire les milliers de jeux de données possibles à ceux qui sont les plus susceptibles de fournir les renseignements spécifiques, puis de vérifier les données sélectionnées. Les outils d’apprentissage automatique se prêtent particulièrement bien à cette tâche. Ils transforment des ensembles de données vastes et complexes et en font ressortir des relations non linéaires pour révéler des informations précieuses ou organisent des données désordonnées afin de mieux évaluer les conclusions tirées. Les sources de données sont validées à plusieurs niveaux, y compris un dialogue direct avec les fournisseurs de données, soulignant l’importance de la participation des humains et des machines au processus.

Bien qu’une plus grande disponibilité des données et une puissance accrue des ressources informatiques aient amélioré le processus systématique de placement en actions, ce dernier dépend toujours de la collaboration entre les humains et la technologie à cette étape de l’évolution de l’IA.

L’IA et les infrastructures

L’IA améliore considérablement l’efficacité de divers actifs d’infrastructures. Des investissements importants sont également nécessaires dans le réseau d’infrastructures pour soutenir l’IA, notamment dans les centres de données, l’électricité nécessaire pour les alimenter et les réseaux par fibre optique pour les connecter aux utilisateurs.

La demande en stockage et en puissance informatique dans les centres de données a bondi. McKinsey estime que la demande mondiale pourrait quadrupler d’ici 2030. Le grand appétit en énergie des centres de données pose des défis d’alimentation. Par exemple, Microsoft a conclu un contrat avec Constellation Energy pour fournir de l’électricité à son nouveau centre de données en Virginie, et Amazon a mis en place des ententes similaires avec Talen Energy Corporation.

L’IA contribue de bien des façons à améliorer l’efficacité des infrastructures. Par exemple, bien qu’un ascenseur fonctionnel soit important dans un immeuble de bureaux, cet ascenseur est essentiel dans un hôpital où il transporte les patients vers des chirurgies vitales. Ce type d’infrastructures est exploité en fonction de la disponibilité, ce qui signifie que si elles ne fonctionnent pas, des déductions sont imposées aux revenus. L’IA est utilisée pour prédire à quel moment un ascenseur pourrait profiter d’un entretien anticipé, réduisant ainsi les déductions de revenu potentielles en raison d’ascenseurs hors service et améliorant le rendement généré par l’actif d’infrastructures.

Dans les aéroports, des modèles d’IA sont utilisés pour optimiser la dotation de personnel aux points de contrôle de sécurité afin de l’apparier au nombre de passagers à différents moments de la journée, ce qui réduit considérablement les temps d’attente. Le temps nécessaire pour passer par la sûreté aéroportuaire sera réduit davantage lorsque la technologie de l’IA biométrique pour saisir les empreintes faciales sera introduite à plus grande échelle.

Risques liés à l’IA

Même si l’IA apporte des contributions importantes dans de nombreux domaines, elle n’est pas sans risque. Un sondage de McKinsey a révélé que le plus important souci de près d’un quart des répondants était l’inexactitude des données, tandis que la cybersécurité occupait le deuxième rang du palmarès des risques.

Le problème de l’inexactitude des données découle du fait que l’ajout de piètres données se traduise en une production de données tout aussi mauvaises. Par conséquent, nous devons nous méfier de la mésinformation qui a lieu lorsque l’IA produit involontairement de faux renseignements. La désinformation, soit les faux renseignements produits intentionnellement par des personnes sans scrupules grâce à l’IA, est encore plus préoccupante. Pour les gestionnaires d’actifs, cela fait ressortir l’importance de vérifier toute source de données utilisée.

Les occasions et défis de l’IA

L’incidence économique de l’IA devrait se matérialiser plus rapidement que celle des technologies d’usage général antérieures, principalement parce que l’IA est une technologie logicielle qui peut être déployée rapidement et efficacement. À mesure que le volume de données continuera de se multiplier, des occasions et des défis se présenteront. L’IA contribue à l’efficacité dans le monde de la gestion d’actifs, en particulier dans certains segments des actions et des infrastructures. Toutefois, son influence devrait s’étendre à de nombreuses autres catégories d’actif au fil du temps. Il est essentiel de rester au fait des progrès technologiques pour éviter d’être laissé pour compte ou, pire, d’être remplacé par l’IA.

* À ne pas confondre avec le GPT à la fin de ChatGPT qui, dans ce cas, signifie transformateur génératif préentrainé.

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juin 12th, 2025