Drapeau des États-Unis et architecture contemporaine en verre du Financial District, New York, É.-U.

Si l’on examine l’ensemble des résultats de cette année d’élections, il est évident que les partis en place dans le monde ont en général été renversés. Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, tous les partis au pouvoir candidats aux élections dans les pays développés ont perdu des voix et ont été chassés du pouvoir ou, dans certains pays, ont été contraints de travailler avec des partis opposés au sein d’une coalition. Les experts ont invoqué diverses raisons pour expliquer ce phénomène. L’une d’entre elles remonte dans le temps, considérant les élections de cette année comme une répudiation totale de l’inégalité économique qui s’est développée depuis la mondialisation. La période qui a suivi la Grande Crise financière a été marquée par la colère populaire, qui s’est lentement intensifiée jusqu’à la période d’inflation élevée après la pandémie, en raison de l’accroissement des mesures budgétaires. Les politiciens ont probablement appris que l’inflation nuit aux perspectives électorales et ils seront plus sensibles à toute hausse et au mécontentement des électeurs.

La victoire décisive des républicains aux élections américaines au début novembre a mis tout cela en relief. Contrairement au premier mandat, cette administration devrait être mieux préparée et donc plus efficace, ce qui signifie qu’une plus grande partie de la plateforme électorale sera mise en œuvre. Il reste toutefois à voir quelles politiques fiscales, tarifaires, d’immigration, de logement et de santé proposées dans le cadre de la campagne seront adoptées. En effet, même si de nombreuses politiques ont été formulées, le président désigné aime être perçu comme un négociateur et est adepte des transactions, cherchant à réaliser une bonne affaire pour les États-Unis. Il en résulte donc une incertitude bien plus grande que ce que les marchés anticipent à l’heure actuelle.

Ce contexte est différent

Jusqu’à présent, les marchés financiers ont adopté la même réaction que lors du premier mandat tumultueux de M. Trump, ce qui s’est traduit par une forte hausse des actions, du dollar américain et des taux obligataires après les élections. Toutefois, cela ne tient pas compte de certaines caractéristiques nettement différentes dans le contexte actuel du marché par rapport au premier mandat du président désigné.

D’abord, l’inflation de l’IPC en 2016 s’est établie en moyenne à environ 1,5 % sur 12 mois aux États-Unis, après avoir été proche de zéro en 2015. Aujourd’hui, l’inflation est passée de 4 % en 2023 à 2,6 % en octobre selon les dernières données. La mesure plus stable de l’inflation de base, qui exclut les composantes volatiles, est toujours supérieure à 3 % et les taux annualisés sur trois mois sont désormais plus élevés (3,6 %). Cela laisse entrevoir une persistance de l’inflation, à laquelle il reste à s’attaquer. Les expulsions prévues entraîneraient une réduction de la main-d’œuvre en âge de travailler et de l’offre de main-d’œuvre, ce qui est en soi inflationniste. Toutefois, le mécontentement suscité par l’inflation élevée a contribué à la frustration des électeurs. Ainsi, même si les décideurs américains semblent déterminés à prolonger les baisses d’impôt et à poursuivre les mesures de relance liées à la demande, ils pourraient être freinés dans leur élan par les pressions inflationnistes, qui pourraient poser problème pour les élections de mi-mandat. Mais plus directement, les nominations du président à des postes ministériels et de direction (notamment le conseiller à la sécurité nationale et le ministère de la Justice) proviennent des élus à la Chambre des représentants, ce qui réduit le coussin de la majorité et menace la capacité d’adopter des lois fiscales en 2025. Par conséquent, les mesures de relance réelles pourraient être plus limitées que ce qui est actuellement prévu par les marchés.

Deuxièmement, les taux d’intérêt ont été extrêmement bas en 2016, atteignant un creux historique de 1,1 % en juillet 2016 après le vote sur le Brexit. Aujourd’hui, les taux des obligations du Trésor américain à 10 ans se négocient dans une large fourchette de 3,75 % à 4,5 %, des niveaux qui remontent à avant la Grande crise financière. Soulignons que les taux à ce niveau sont également associés à une volatilité accrue des marchés. Au cours des trois dernières années, à mesure que les marchés boursiers ont progressé, nous avons connu quatre replis des marchés haussiers. Deux d’entre eux ont été déclenchés par des événements : la crise des banques régionales américaines en mars 2023 et le relèvement du taux directeur de la Banque du Japon, qui était de 0,1 % en août 2024, ce qui a entraîné une réévaluation des opérations de portage sur le yen. Toutefois, les autres événements se sont produits lorsque les taux des obligations du Trésor américain à 10 ans ont atteint 4,5 % en septembre 2023 et en avril 2024 (graphique 1). Lors des replis de 2023, une intervention considérable a été nécessaire, laquelle a pris la forme d’un élargissement du bilan de la Fed et d’une modification du financement de la dette fédérale aux États-Unis, qui est passée des obligations au papier à court terme. En fin de compte, cette dernière mesure a limité l’offre d’obligations à long terme et contribué à réduire les taux d’intérêt à long terme. Paradoxalement, cela signifie également que les charges d’intérêts sur la dette fédérale ont augmenté en raison de l’inversion de la courbe des taux. Ces niveaux importants de dette et de déficit fédéraux pourraient entraîner des flambées des taux à long terme, car les marchés évaluent les difficultés budgétaires, tout comme ils l’ont fait en France et au Royaume-Uni cette année. Le problème le plus important est toutefois que les taux d’intérêt oscillent maintenant autour des niveaux que les marchés boursiers considèrent comme problématiques.

Enfin, un autre changement par rapport à 2016 est le leadership de l’ordre mondial, car les élections ont causé des bouleversements. Comme les États-Unis se concentrent sur leur propre pays, il y a peu de contrepoids à la stabilité. Les électeurs européens rejettent également le statu quo, ce qui contraste avec 2016, lorsque la chancelière allemande Angela Merkel était au pouvoir depuis 11 ans, dans un rôle qui a duré 16 ans, ce qui contrebalançait l’agitation aux États-Unis. Bien que peu remarqué, le gouvernement de coalition du chancelier allemand Olaf Scholz s’est effondré après moins de deux ans au pouvoir, et des élections sont prévues en février 2025. Des structures de gouvernement de coalition tout aussi bancales persistent en France, après la défaite du président Macron aux élections législatives européennes et des élections anticipées au pays qui ont donné lieu à un parlement minoritaire. Les changements à venir aux États-Unis signifient qu’en plus des problèmes de leadership nationaux, chaque pays devra faire face à un bouleversement des relations commerciales et chercher des alliés fiables.

Comprendre les véritables tendances pour les prochaines années

Aujourd’hui, la volatilité des marchés boursiers s’est considérablement atténuée et les indicateurs d’humeur sont orientés à la hausse. Les politiques réellement mises en œuvre ne seront connues qu’au fil du temps, mais beaucoup de choses pourraient perturber le marché haussier. La volonté du nouveau président de renverser les principaux ministères, notamment ceux de la Défense, de la Justice et de la Santé, en choisissant les membres du cabinet laisse présager l’imprévisible. L’éventail des perspectives politiques est plus vaste que jamais. Toutefois, il existe différentes périodes de placement, dont l’une est à court terme, au cours desquelles la Fed et les marchés se concentrent sur les données à court terme et se demandent si l’inflation continuera de diminuer. Ensuite, la nouvelle administration mettra en œuvre des politiques commerciales, budgétaires et macroéconomiques à plus long terme au cours de la prochaine ou des deux prochaines années. En fin de compte, nous croyons que nous amorçons une accélération de la transition déjà évidente d’une faible croissance et de faibles taux d’intérêt après la crise financière mondiale. Cependant, la volatilité des taux et des actions augmentera en raison de l’incertitude entourant l’établissement des politiques et leurs résultats. Ces éléments sont contradictoires pour les investisseurs. Nous surveillerons donc les politiques qui améliorent la productivité, comme les investissements, les baisses d’impôt ciblées et la déréglementation, qui pourraient accroître la confiance et l’optimisme des entreprises. En attendant que la politique soit plus claire, les spéculations vont bon train et nous demeurons vigilants dans l’évaluation des signes précurseurs de ces points d’inflexion au cours du prochain cycle.

Marchés financiers

Même si les marchés ont connu des fluctuations au début du mois d’août et de septembre, ils ont enregistré de solides rendements au troisième trimestre. Cette situation s’est quelque peu inversée avec la faiblesse des obligations et des actions en octobre. Malgré la réduction inattendue de 50 pb du taux directeur par la Fed, les taux d’intérêt ont augmenté de façon constante après cette réduction importante, les données de croissance ayant été invariablement plus élevées que prévu. Plus particulièrement, le PIB a progressé à un rythme rapide de 2,8 % au troisième trimestre et les données sur la confiance, comme l’indice ISM du secteur des services, ont recommencé à signaler une expansion. Cela a incité les participants aux marchés à réduire la probabilité d’une baisse plus rapide des taux d’intérêt, et le taux des obligations du Trésor américain à 10 ans a augmenté jusqu’à 4,5 %.

Après avoir progressé de 5,5 % au troisième trimestre, l’indice S&P 500 a reculé de 1 % en octobre. En novembre, les marchés se sont remis des pertes d’octobre et plus encore, progressant d’environ 3 %, les secteurs des banques, de la consommation discrétionnaire, de l’industrie et de l’énergie affichant tous de bons rendements. Après avoir eu le temps d’absorber les répercussions du choix des membres du cabinet, les secteurs sensibles aux taux d’intérêt et les produits pharmaceutiques ont tiré de l’arrière. La période de publication des résultats du troisième trimestre tire à sa fin, et la croissance des bénéfices et des ventes a surpassé les attentes. La croissance des bénéfices au troisième trimestre est supérieure de plus de 8 % à celle de l’an dernier et les trois quarts des sociétés ont dépassé les prévisions. Les actions canadiennes ont bondi de 10,5 % au troisième trimestre. Au cours de la période qui a suivi les élections, la réaction impulsive à l’idée que la politique tarifaire nuirait à toutes les sociétés, sauf celles des États-Unis, a entraîné le rendement inférieur de l’indice S&P/TSX. Cette situation a été de courte durée et l’indice S&P/TSX a depuis rebondi, la vigueur de la finance et des technologies de l’information ayant compensé la baisse des prix de l’énergie et les difficultés économiques.

Les obligations canadiennes ont inscrit des gains pendant cinq mois consécutifs jusqu’en septembre, de sorte que l’indice des obligations universelles FTSE a progressé de 4,7 % au troisième trimestre, avant de reculer de 1 % en octobre. Les taux obligataires canadiens sont en hausse depuis les creux de la mi-septembre et ont encore progressé dans la foulée des élections, les taux obligataires à 10 ans atteignant 3,35 %, leur plus haut niveau depuis juillet. Depuis, les taux canadiens ont été inférieurs à ceux des États-Unis. Cette tendance n’est pas surprenante étant donné que les politiques proposées par les États-Unis ont fait augmenter les attentes d’une reprise de l’inflation. Le chemin a été cahoteux, mais le président Powell a clairement renforcé les attentes du marché à l’égard d’un ralentissement des réductions de taux, soulignant qu’il n’est pas nécessaire d’abaisser les taux compte tenu des signaux actuels de l’économie concernant la croissance et l’inflation.

Stratégie de portefeuille

Depuis un an ou plus, le débat sur le contexte macroéconomique consiste à savoir si les banques centrales auront la capacité de tirer leur épingle du jeu et de produire un atterrissage en douceur de l’économie américaine, après une inflation et des taux d’intérêt élevés qui n’existaient pas depuis 20 ans. Au dernier trimestre, l’inquiétude a semblé s’éloigner des préoccupations à l’égard de l’inflation pour se porter sur la croissance, les banques centrales ayant toutes commencé à assouplir leur politique monétaire. Toutefois, comme les élections de l’année se sont accompagnées de votes populistes, la question semble moins porter sur les atterrissages en douceur que sur la possibilité d’une reprise de la croissance élevée et de l’inflation élevée. Pour ce faire, il faudra assouplir les politiques monétaire et budgétaire afin de contrebalancer le resserrement des politiques commerciales et d’immigration. À court terme, le contexte macroéconomique fondamental positif aux États-Unis ainsi que la solide croissance, le marché de l’emploi équilibré et les conditions financières favorables nous ont incités à couvrir la sous-pondération des actions dans les fonds équilibrés au début d’octobre et à maintenir une sous-pondération des titres à revenu fixe et une surpondération des liquidités. Les portefeuilles de titres à revenu fixe conservent des positions qui profitent d’une accentuation de la courbe des taux. Les portefeuilles d’actions canadiennes fondamentales s’ajustent afin de profiter du rapatriement des activités et continuent de rechercher des sociétés cycliques de grande qualité, comme celles des secteurs de l’industrie, de la finance et des matériaux. Nous évaluons la combinaison des valorisations relativement élevées et d’une possible réaccélération de la croissance et de l’inflation au cours de la prochaine année – et des quatre prochaines années – qui seront sans aucun doute remplies de surprises.

Graphique 1 : turbulences sur les marchés boursiers en période de hausse des taux
Ce graphique montre l’évolution de l’indice S&P 500 depuis 2022. L’indice suit une tendance à la hausse, mais connaît des périodes de turbulences liées à la hausse des taux d’intérêt et aux chocs des marchés.

Source : S&P Global et Macrobond.

Nageur dans une piscine olympique.

L’été a été tout sauf calme sur les marchés financiers, malgré les distractions en lien avec les Jeux olympiques et les manchettes constantes en matière de politique. Les actions mondiales ont reculé, l’indice MSCI Monde tous pays reculant de 8,3 % par rapport à son sommet du 16 juillet avant de toucher un creux au début d’août. Les plus fortes fluctuations des cours ont été observées en Asie, surtout du côté de l’indice Nikkei, qui a reculé de 25 % en trois semaines, mais d’autres marchés, dont la Corée du Sud et Taïwan, ont aussi fortement fléchi. Le délestage a été rapide et s’est accéléré dans la foulée de la décision prise le 30 juillet par le Comité de l’open market de la Réserve fédérale américaine (FOMC) de laisser les taux d’intérêt inchangés.

Trois événements clés sont survenus l’un après l’autre au cours de cette période et ont entraîné une importante aversion au risque sur les marchés mondiaux. Premièrement, les données publiées à la suite de la décision du FOMC ont montré que l’économie ralentissait considérablement. L’indice ISM aux États-Unis a chuté à son plus bas niveau de l’année, à 46,8, et les composantes de l’emploi et de la production, en particulier, ont touché un creux pour l’année. L’emploi aux États-Unis a également déçu avec un gain global de 114 000 postes, mais surtout la hausse du taux de chômage, qui s’est établi à 4,3 %, soit plus d’un demi-pour cent au-dessus des récents creux, ce qui a historiquement été un signe de récession. Deuxièmement, la banque centrale la plus conciliante du monde, la Banque du Japon, a surpris les marchés en décrétant une hausse des taux d’intérêt de 0,1 % à 0,25 % le 31 juillet et en ralentissant de moitié le rythme de ses achats d’obligations. Cela a réduit l’écart prévu entre les taux japonais et américains vu les politiques divergentes des banques centrales. Par conséquent, le yen s’est apprécié par rapport au dollar américain, passant de 162 à 145. Cette hausse a eu pour effet d’annuler les caractéristiques attrayantes entourant les opérations de portage sur le yen, qui profitent des emprunts à faible taux d’intérêt dans une monnaie bon marché et des placements dans des actifs à rendement élevé d’autres pays. Les sociétés japonaises, dont bon nombre sont des conglomérats mondiaux qui seront touchés par la hausse du yen, ont aussi vu le cours de leur action chuter. Troisièmement, les sociétés technologiques américaines à mégacapitalisation ont annoncé des bénéfices généralement plus faibles, et les investisseurs se sont demandé à quel moment les investissements massifs dans les sociétés technologiques liées à l’intelligence artificielle (IA) finiraient par porter fruits.

Les messages sous la surface

Même en l’absence des principaux éléments déclencheurs de la récente volatilité, il est devenu évident que les valorisations sont rendues assez élevées (graphique 1). Il est difficile de prévoir un potentiel de hausse important pour les actions en général, étant donné que leurs cours reflétaient un scénario plutôt optimal de décélération de l’inflation, de croissance stable et d’assouplissement des taux. Les cours boursiers reflétaient essentiellement un scénario parfait, les positions étant constamment prises en vue d’une hausse sans protection contre les baisses. En effet, sous la surface, la rotation des actions est révélatrice. Les actions américaines ont été stimulées par un groupe restreint d’actions (les sept magnifiques), qui sont passées de sept à seulement une (Nvidia). Cela sous-entendait que, sur une base pondérée en fonction de la capitalisation boursière, les gains étaient attribuables à un plus petit groupe d’actions, et ont atteint un sommet de 40 ans par rapport à un indice qui pondérait chaque titre de façon égale (graphique 2). Toutefois, au cours des dernières semaines, cette tendance a commencé à s’inverser. Les actions très chères à mégacapitalisation ont été vendues au profit d’actions d’autres secteurs. Nous assistons à un élargissement des meneurs du marché, les actions à petite capitalisation ayant enregistré des rendements supérieurs, tout comme les secteurs des services aux collectivités, des biens de consommation de base et de l’immobilier, ce qui est très inhabituel.

Graphique 1 : Les valorisations sont élevées

Ce graphique intitulé « Les valorisations sont élevées » suit le ratio cours/bénéfice de l’indice S&P 500, en utilisant les bénéfices prévisionnels sur 12 mois. Ce ratio est passé d’environ 15,3 en septembre 2022 à environ 21 en juillet 2024, comparativement à la moyenne à long terme de 15,7 depuis 1985. Ce graphique montre les valorisations élevées par rapport aux moyennes historiques.Source : I/B/E/S.

 

Graphique 2 : La domination du groupe restreint de meneurs avait trop duré
Ce graphique intitulé « La domination du groupe restreint de meneurs avait trop duré » montre l’indice S&P 500 par rapport à l’indice S&P 500 équipondéré. Il compare le rendement de l’indice S&P 500 lorsqu’il est pondéré en fonction de la capitalisation boursière et pondéré de manière égale. Lorsque le rendement de l’indice est généré en majeure partie par un plus petit nombre d’actions, ce ratio augmentera. Fait à noter, ce graphique montre une forte augmentation de la concentration depuis le début de 2023 jusqu’en juillet 2024, mais celle-ci s’est considérablement atténuée au cours des semaines suivantes.Sources : S&P Global et Macrobond.

 

De plus, la volatilité des marchés boursiers a atteint un niveau exceptionnellement élevé au cours de cette période (graphique 3). Au cours de la journée, l’indice VIX a bondi pour atteindre son troisième plus haut niveau jamais enregistré après l’effondrement de Lehman Brothers en 2008 et le début de la crise de la COVID-19 en 2020. Il est particulièrement inhabituel de voir une hausse de l’incertitude, sans événement déclencheur évident. Il est également révélateur que les prix de l’or aient dégringolé au cours des pires jours du début d’août. Tout cela donne à penser que le marché a connu une liquidation généralisée par rapport à son positionnement extrême, plutôt qu’un événement provoquant une aversion importante au risque. En effet, les marchés se sont redressés et se sont stabilisés dans les jours qui ont suivi.

Graphique 3 : La volatilité intrajournalière a atteint son troisième plus haut niveau jamais enregistré

Ce graphique intitulé « La volatilité intrajournalière a atteint son troisième plus haut niveau jamais enregistré » montre les sommets intrajournaliers de l’indice de volatilité du S&P 500 (VIX) au cours des 30 dernières années. En juillet, le troisième plus haut niveau a été atteint après l’effondrement de Lehman Brothers en 2008 et la crise de la COVID-19 en 2020. C’est étrange, car il n’y a pas eu d’événement déclencheur évident.Sources : Chicago Board Options Exchange (CBOE) et Macrobond.

Et maintenant, que nous réserve l’avenir?

Compte tenu des récents événements et de l’humeur des investisseurs, il semble que les marchés semblent quelque peu vulnérables en ce moment. En ce qui a trait aux données fondamentales, il semble que la croissance doit rebondir, sinon les actifs risqués chercheront à profiter des réductions de taux des banques centrales. Il convient toutefois de noter que toute rencontre d’urgence ou toute réduction démesurée serait probablement mal interprétée, indiquant que quelque chose ne va pas du tout. L’ancien scénario de reprise de la croissance est peut-être toujours possible – nous avons traversé une période de conditions financières en dents de scie qui a entraîné des réactions rapides de l’économie, et les conditions se sont assouplies au cours de la période récente. Nous sommes toutefois prudents quant aux perspectives d’une reprise de la croissance en ce moment. Les dépenses sont cruciales et dépendent généralement du fait que les gens ont un emploi et le gardent. La tendance au niveau des données sur l’emploi laisse entrevoir une détérioration des marchés de l’emploi. Toutefois, plus récemment, nous avons constaté qu’un facteur de plus en plus important en ce qui concerne la confiance à l’égard des dépenses est lié à l’effet de richesse. En effet, depuis la pandémie, de nouveaux ménages, en particulier ceux des groupes à plus faible valeur nette, ont commencé à devenir actionnaires, investissant l’argent de leurs chèques de relance sur les marchés boursiers (graphique 4). La valeur des actions et des maisons a considérablement augmenté, mais est maintenant en train de chuter. Les réductions de taux, qui sont sur le point de commencer, devraient apporter un certain soutien. Toutefois, l’assouplissement de la politique monétaire sera surtout favorable dans les pays où la dette est élevée et assortie de taux variables ou encore le taux de rotation de la dette est élevé. C’est exactement le contraire de ce qui se passe aux États-Unis, où la dette du secteur privé a été en grande partie refinancée. Par exemple, ce qui stimule en bonne partie l’économie aux États-Unis est le refinancement des prêts hypothécaires lorsque les taux d’intérêt baissent. Toutefois, une part importante des ménages américains ont des prêts hypothécaires de 30 ans assortis de taux effectifs qui se situent à environ 3,5 %. Comme les taux actuels sont d’environ 6,75 % aux États-Unis, les taux hypothécaires ont encore beaucoup de chemin à faire avant de commencer à stimuler la consommation (graphique 5).

Graphique 4 : L’évolution des marchés boursiers a de l’importance pour un groupe croissant de ménages américains
Participation au capital-actions selon la répartition de la richesse aux États-Unis
Ce graphique intitulé « L’évolution des marchés boursiers a de l’importance pour un groupe croissant de ménages américains » illustre les changements survenus depuis janvier 2020 dans la valeur des placements en actions des ménages américains selon la répartition de la richesse. Le graphique montre quatre lignes pour la tranche supérieure de 1 % des ménages, la tranche supérieure de 10 %, la tranche suivante de 40 % et la tranche inférieure de 50 %. La plus forte hausse a été enregistrée pour la tranche inférieure de 50 %, principalement durant la période de 2020-2021, lorsque les ménages ont reçu des chèques de relance et ont investi l’argent dans des actions.Sources : Réserve fédérale et Macrobond.

 

Graphique 5 : Le refinancement hypothécaire a fait du surplace
Ce graphique intitulé « Le refinancement hypothécaire a fait du surplace » présente deux lignes qui illustrent les activités de refinancement hypothécaire aux États-Unis et le taux hypothécaire moyen à 30 ans aux États-Unis. Les activités de refinancement ont chuté à leur plus bas niveau du présent cycle, car les taux hypothécaires ont augmenté. Étant donné que les taux hypothécaires moyens se situent entre 6 % et 7 % et que les taux hypothécaires effectifs se situent actuellement entre 3 % et 4 %, il faudra une forte baisse des taux d’intérêt avant que ces activités ne reprennent.Sources : MBA, Bankrate et Macrobond.

 

Compte tenu de tous ces facteurs, les marchés sont de plus en plus prudents, et plus sensibles à un ralentissement de la croissance. Aux États-Unis, les consommateurs font preuve de plus de prudence, bénéficiant moins des réductions de taux prévues, tandis que le taux de chômage augmente. La confiance à l’égard du boom de l’IA est vacillante et le dernier endroit au monde où les emprunts étaient bon marché a laissé entendre que la fête était terminée. Les thèmes du marché qui ont dominé au cours des dernières années sont en train de changer, et la volatilité devrait rester élevée.

Marchés financiers

Dans l’ensemble, les marchés boursiers ont progressé au deuxième trimestre jusqu’à la mi-juillet. La stabilité des données économiques aux États-Unis et l’atténuation de l’inflation ont soutenu les perspectives quant au scénario idéal, malgré la myriade de résultats électoraux surprenants à l’échelle mondiale, les fluctuations entourant l’élection aux États-Unis et l’intensification des tensions géopolitiques. Les banques centrales ont commencé à assouplir leurs politiques de façon synchronisée, la Banque du Canada rejoignant la Banque d’Angleterre, la Banque centrale européenne et la Banque nationale suisse. Au deuxième trimestre, l’indice MSCI Monde tous pays a progressé de 4 %, ce qui porte ses gains pour le premier semestre à 15,5 %. Les sept magnifiques ont propulsé l’indice S&P 500 à des sommets records, ce dernier inscrivant un gain de 5,4 % au deuxième trimestre et de 19,6 % au premier semestre, avant que la volatilité ne s’installe en juillet. Environ 80 % des sociétés ont publié leurs résultats et la croissance des bénéfices au deuxième trimestre se poursuit à un rythme soutenu, mais a légèrement ralenti par rapport au premier trimestre. L’indice composé S&P/TSX a tiré de l’arrière par rapport à l’ensemble des marchés boursiers, reculant de 0,5 % au deuxième trimestre, pour enregistrer un gain plus modeste de 6,1 % au premier semestre. À la mi-juillet, le marché a changé de ton et l’indice S&P/TSX a enregistré un gain de 5,9 % pour le mois, le changement au niveau des meneurs du marché ayant notamment favorisé les secteurs défensifs.

Malgré la forte volatilité des marchés boursiers, les marchés des devises et des obligations ont été, du moins relativement, plus modérés. Au deuxième trimestre, l’indice des obligations universelles FTSE Canada a progressé de 0,9 %, et de 2,4 % en juillet après la série de statistiques décevantes mentionnées plus tôt. Bien que les mouvements quotidiens aient été généralement ordonnés, les taux d’intérêt à court terme au Canada et aux États-Unis ont chuté de près de 1 % au troisième trimestre, alors que les investisseurs recherchaient la sécurité des obligations. Les écarts de taux se sont élargis, parallèlement à l’aversion au risque. Bien que la volatilité ait été évidente sur les marchés boursiers, elle semble limitée pour l’instant, car les titres de créance ont suscité une demande et les émissions sont demeurées étonnamment fortes pendant cette période difficile, les émetteurs cherchant à tirer parti de la baisse des taux d’intérêt et de toute tendance positive. Les importantes fluctuations sur les marchés obligataires ont compris l’élargissement des écarts de taux de la France par rapport aux autres pays de la zone euro, en raison de son important déficit et du niveau élevé de la dette publique, qui a suscité des inquiétudes à la suite de l’élection législative au pays. Dans l’ensemble, les matières premières ont fléchi, les métaux industriels, l’agriculture et l’énergie ayant reculé.

Stratégie de portefeuille

La confiance à l’égard d’un atterrissage en douceur a été élevée au cours de la dernière année et les marchés boursiers ont tenu compte de ce scénario idéal. Le mois dernier, un nouveau contexte a été observé. L’objet de l’anxiété des participants au marché est passé de l’inflation à la croissance. Par conséquent, une grande partie de ce qui était pris en compte auparavant est en train de se renverser, et les marchés s’ajustent toujours à l’évolution de la dynamique des opérations de portage sur le yen et aux inquiétudes quant au moment où l’on peut s’attendre à tirer un rendement des investissements massifs dans l’IA. Alors que cette anxiété persiste, les marchés exercent des pressions sur les banques centrales pour qu’elles stimulent l’économie, ce qui fait baisser les taux d’intérêt à court terme. Mais pour répondre à cette demande, les tendances inflationnistes doivent continuer de diminuer, ce qui est probable, mais pas certain. L’incertitude et la volatilité devraient persister au deuxième semestre de l’année. Par conséquent, nous préférons les titres plus défensifs aux titres cycliques davantage liés à la santé de l’économie. Par exemple, nous étoffons nos placements dans les sociétés des services aux collectivités et des biens de consommation de base. Les portefeuilles de titres à revenu fixe continuent de détenir des positions qui profitent de la normalisation de la courbe des taux, soit lorsque son inversion s’atténue, tout en sous-pondérant légèrement les obligations de sociétés. Les portefeuilles équilibrés continuent de sous-pondérer modestement les actions et de surpondérer les obligations et les liquidités, et nous accentuerons ce positionnement défensif si le ralentissement économique se révèle plus durable. Sur une note positive, les périodes de volatilité créent souvent de bonnes occasions, et nous sommes vigilants à l’égard des valorisations trop élevées, tout en restant prudents et conscients des risques croissants.

A sharp fall in the global manufacturing PMI new orders index in July confirms renewed industrial weakness. The companion services survey, however, reported an uptick in the new business component, which is close to its post-GFC average. Will services resilience sustain respectable overall growth?

The understanding here is that economic fluctuations originate in the goods sector, reflecting cycles in three components of investment – stockbuilding, business fixed capex and housing. Multiplier effects transmit these fluctuations to the services sector – there is no independent services cycle.

The manufacturing new orders and services new business indices have been strongly correlated historically, with Granger-causality tests indicating that the former leads the latter but not vice versa*.

Several considerations suggest that the recent divergence will be resolved by the services new business index moving lower:

1. The services future output index correlates with new business and fell to an eight-month low in July – see chart 1.

Chart 1

20240808_NSP_MMM_C1_GlobalServicesPMINewBusinessFutureOutput

2. Recent new business readings have been inflated by strength in financial services – chart 2. Financial services new business correlates with stock market movements, suggesting weakness ahead.

Chart 2

20240808_NSP_MMM_C2_GlobalServicesPMINewBusiness

3. Consumer services new business correlates with the manufacturing consumer goods new orders index, which fell below 50 in July – chart 3.

Chart 3

20240808_NSP_MMM_C3_GlobalConsumerGoods

Output price indices for consumer goods and services support the optimism here about inflation prospects through mid-2025. A weighted average has fallen back to its October 2009-December 2019 average, a period in which G7 annual CPI inflation excluding food / energy averaged 1.5% – chart 4.

Chart 4

20240808_NSP_MMM_C4_GlobalConsumerPrices

*Contemporaneous correlation coefficient since 1998 = +0.84. Granger-causality tests included six lags. Manufacturing terms were significant in the services equation but not vice versa.

post in June suggested that a recovery in the OECD’s US composite leading indicator was ending. A calculation based on the latest input data confirms a reversal lower.

The historical performance of the OECD indicator compares favourably with the Conference Board leading index. The OECD indicator recovered from early 2023, signalling that recession risk was (temporarily?) receding, while the Conference Board measure continued to weaken.

The latest published data point, for June, was released in early July. The next update is due on 5 September and will provide July / August numbers.

Chart 1 shows the published series (black), a replica series calculated here based on data available in early July (blue) and an updated replica incorporating an additional month of input data (gold). The updated series has fallen sharply from an April peak.

Chart 1

20240807_NSP_MMM_C1_OECDUSLeadingIndicator

The decline reflects weakness in four components: consumer sentiment, durable goods orders, the manufacturing PMI and housing starts. The two financial components – stock prices and the 10-year Treasury yield / fed funds rate spread – were still marginally positive in July but levels so far in August imply a turn lower.

The price relative of MSCI World cyclical sectors, excluding tech, versus defensive sectors has mirrored movements in the OECD US leading indicator historically – chart 2. Relative valuation is high versus history and has diverged from a weakening global manufacturing PMI – chart 3.

Chart 2

20240807_NSP_MMM_C2_OECDUSLeadingIndicatorMSCIWorldCyclicalSectors

Chart 3

20240807_NSP_MMM_C3_MSCIWorldCyclicalExTechPrice

Manufacturing PMI results for July support the forecast of a global “double dip” into early 2025.

The global manufacturing PMI new orders index plunged by 1.9 points from June to 48.8, a seven-month low. The combination of a one-month fall of this magnitude or greater and a sub-50 reading occurred in only 14 months since 1998, highlighted by shading in chart 1.

Chart 1

20240802_NSP_MMM_C1_GlobalManufacturingPMINewOrders

In chronological order, those months were:

  • October 1998 (Asian / Russian / LTCM crises)
  • December 2000 / January 2001 (start of US / global recession)
  • September / October 2001 (911 terrorist attack)
  • March 2003 (Iraq invasion)
  • September through December 2008 (GFC climax)
  • November 2011 (Eurozone crisis / recession)
  • February through April 2020 (covid recession)

So the current signal suggests significant economic weakness and risk-off markets, at least until policy-makers respond.

The forecast that global economic momentum would weaken in H2 2024 was based on a fall in six-month real narrow money momentum into a low in September 2023 and an observation that the money-activity lag has recently extended to a year or more – chart 2.

Chart 2

20240802_NSP_MMM_C2_GlobalManufacturingPMINewOrdersREalNarrowMoney

The September 2023 real money momentum low suggests that PMI new orders will reach a low by January 2025. With money trends still weak, however, a recovery may be lacklustre.

Could PMI new orders break below the low of 46.5 reached in December 2022? The low in six-month real narrow momentum in September 2023 was beneath the preceding low in July 2022 – chart 2. Current weakness is more likely to spill over into labour markets, creating negative feedback loops.

“Surprise” economic deterioration is forecast to be accompanied by sharply weaker inflationary pressures, reflecting broad money stagnation in H2 2022 / H1 2023. The consumer goods PMI output price index fell back below its pre-pandemic average in July, following a plunge in the consumer services index the prior month – chart 3.

Chart 3
20240802_NSP_MMM_C3_GlobalConsumerGoods

Le Capitole des États-Unis à Washington D.C., au coucher du soleil.

Dans nos Prévisions pour 2024, nous avons mentionné que plusieurs pays où vit plus de la moitié de la population mondiale, qui représentent près des deux tiers du PIB mondial et 80 % de la valeur boursière mondiale, tiendront des élections cette année. Aucune de ces élections ne sera aussi importante pour l’économie mondiale et les marchés financiers que le bras de fer que se livreront les présidents Biden et Trump en novembre aux États-Unis. Selon les sondages, la course est très serrée entre les deux hommes, même à l’échelle nationale, mais Trump mène dans des États pivots. Les républicains cherchent à remporter la majorité au Sénat, tandis que les démocrates semblent plus susceptibles de remporter la majorité à la Chambre des représentants. Puis, un certain nombre d’événements judiciaires lourds de conséquences auront lieu d’ici novembre (notamment des procès civils et criminels et la décision de la Cour suprême sur l’immunité présidentielle contre les poursuites), ce qui rend les résultats de ce cycle électoral particulièrement volatils et difficiles à prévoir.

Leçons tirées des années électorales précédentes

Lorsque toutes les manchettes laissent planer l’incertitude sur les résultats d’une élection et que chaque élection semble plus lourde de conséquences que la précédente, il est normal de s’attendre à de la volatilité. Pourtant, l’indice VIX (volatilité du marché boursier) et l’indice MOVE (volatilité du marché obligataire) ne montrent aucune augmentation persistante de la volatilité réalisée lors des années électorales (graphique 1). De plus, les marchés boursiers se comportent généralement bien pendant les années électorales, en raison des mesures de relance (graphique 2), sans aucune différence notable au chapitre du rendement moyen entre les années électorales et les autres années.

Graphique 1 : À l’exception de 2008, la volatilité lors des années électorales est conforme à la moyenne
Ce graphique intitulé « À l’exception de 2008, la volatilité lors des années électorales est conforme à la moyenne » montre les niveaux de l’indice de volatilité S&P 500 (VIX) lors des années électorales aux États-Unis, de 1992 à 2020, ainsi que le niveau moyen de l’indice VIX de 1991 à 2023. Il indique notamment que la volatilité lors des années électorales a été largement conforme à la moyenne, à l’exception de 2008, année où la volatilité a monté en flèche en réaction à la crise financière. Sources : CBOE et Macrobond.

Graphique 2 : Les actions américaines se comportent bien avant et après les élections
Rendement de l’indice S&P 500 les jours précédant et suivant une élection présidentielle depuis 1952, indexé à 100 le jour de l’élection x = 0
Ce graphique intitulé « Les actions américaines se comportent bien avant et après les élections » illustre l’évolution du rendement moyen de l’indice S&P 500 lors de toutes les élections présidentielles américaines depuis 1952, sur une période de 500 jours avant et après les élections, indexé à 0 le jour de l’élection. Le graphique montre une tendance à la hausse constante de l’indice à l’approche et au sortir de la période électorale.Sources : S&P Global et Macrobond.

Il existe également une perception selon laquelle l’indépendance de la Réserve fédérale américaine (Fed) face au pouvoir politique devrait se traduire par une inaction de sa part à l’égard des taux directeurs. Toutefois, depuis 1972, il n’y a eu qu’une seule année électorale où les taux directeurs ont terminé l’année au niveau où ils l’avaient commencée (graphique 3). C’était pendant la longue période de politiques de taux d’intérêt nuls, de 2009 à 2016. Nombreux sont ceux qui souhaitent que la Fed conserve ses objectifs axés sur le maintien de l’inflation à 2 % et le maintien des conditions d’un taux d’emploi durable maximal. Il convient de noter que l’indépendance de la Fed est remise en question, car le mandat du président Powell prend fin en mai 2026. Trump a laissé entendre qu’il aimerait exercer un certain contrôle sur les décisions de politique monétaire, allant même jusqu’à suggérer qu’il soit consulté sur les changements. Évidemment, il est peu probable que le Congrès désigne un candidat plus influençable. De plus, toute tentative de politiser directement les actions de la Fed se solderait vraisemblablement par une hausse contreproductive des taux d’intérêt à long terme (du fait de l’anticipation d’une poussée de l’inflation à long terme). Examinons d’autres conséquences sur le marché.

Graphique 3 : La Fed n’hésite pas à modifier sa politique monétaire pendant les années électorales
Ce graphique intitulé « La Fed n’hésite pas à modifier sa politique monétaire pendant les années électorales » illustre les modifications apportées au taux des fonds fédéraux lors des années électorales aux États-Unis, de 1972 à 2020. Chaque barre représente la variation du taux des fonds fédéraux au cours d’une année électorale donnée, les valeurs positives indiquant un resserrement de la politique monétaire et les valeurs négatives indiquant un assouplissement. Le taux des fonds fédéraux n’est resté inchangé qu’en 2012. Sources : Réserve fédérale et Macrobond.

Conséquences des programmes politiques américains sur les marchés

L’une des principales différences entre les deux candidats est leur vision extérieure du monde, l’un divisant le monde en coalitions amicales et hostiles, l’autre plaçant l’Amérique au premier rang par rapport à tous les autres pays. Il n’est pas surprenant que l’un des grands thèmes qui émergent de l’élection américaine soit l’anticipation de différences importantes dans le fonctionnement de l’économie mondiale selon le résultat de l’élection. Les droits de douane pourraient constituer l’une des divergences politiques qui auront le plus de répercussions. Trump a proposé une forte hausse de 10 % pour tous les pays et de 60 % pour les importations en provenance de Chine. Même en l’absence de représailles des autres pays, une telle mesure perturberait considérablement l’activité économique, ce qui se traduirait par une incertitude dans les relations commerciales, un remaniement des chaînes d’approvisionnement et une accumulation de stocks par mesure de précaution – des facteurs qui peuvent tous contribuer à une montée de l’inflation. Le Canada et le Mexique pourraient demander des exemptions particulières, mais l’ACEUM, qui remplace l’ALENA, doit faire l’objet d’un examen en 2026, dans le cadre d’un cycle de six ans. Sans exemption des droits de douane, le Canada, une économie ouverte largement tributaire de ses échanges commerciaux avec les États-Unis, verrait son PIB reculer. De plus, une telle situation mettrait en lumière les problèmes de productivité du Canada et ses difficultés à être compétitif et à réagir aux chocs.

Par ailleurs, tout comme le Canada, les États-Unis ont connu une forte croissance démographique avec l’arrivée massive d’immigrants. Trump a proposé de déporter un grand nombre d’immigrants illégaux (environ 10 millions). Bien qu’il puisse s’agir d’une mesure irréaliste et complexe sur le plan logistique, une baisse de 3 % de la population aurait une incidence à la fois sur les dépenses et l’activité économique, tout en réduisant la main-d’œuvre, ce qui est en soi inflationniste.

Aucun des deux candidats à la présidentielle n’a exprimé l’intention de contenir les politiques budgétaires expansionnistes. La situation démographique indique déjà que les coûts intégrés des soins de santé et de la sécurité sociale augmentent considérablement. Biden a proposé des mesures en matière de revenus, comme laisser expirer les baisses d’impôt de Trump, relever de sept points de pourcentage, à 28 %, le taux d’imposition des sociétés et augmenter l’impôt sur les rachats d’actions de sociétés, qui passerait de 1 % à 4 %. Ces mesures contribueraient à freiner la croissance incontrôlée du déficit, mais pourraient ralentir la croissance économique et l’inflation et aussi avoir une incidence sur les cours boursiers. En revanche, il est probable que Trump prolonge les baisses d’impôt qu’il a imposées lors de son premier mandat.

Les niveaux d’endettement continueront également d’augmenter. Le Congressional Budget Office (CBO) prévoit que la dette passera d’environ 100 % du PIB en 2025 à 115 % du PIB en 2035. Les frais d’intérêts nets, qui représentent déjà 16 cents de chaque dollar de recettes fédérales, augmenteront parallèlement à la dette et dépasseront toutes les autres dépenses, sauf celles liées à la sécurité sociale et à Medicare. L’accroissement des déficits budgétaires déjà élevés incitera probablement les investisseurs en obligations à exiger une prime de risque budgétaire (c.-à-d. des rendements plus élevés). Il est presque impossible de prévoir à quel moment un changement d’humeur se produira, mais il peut être provoqué par des événements comme un budget (comme ce fut le cas au Royaume-Uni en septembre 2022) ou une élection. Une hausse des taux d’intérêt à long terme aurait une incidence défavorable sur les emprunts et sur les valorisations des autres catégories d’actif.

Enfin, les problèmes réglementaires pèseront probablement sur différents secteurs. Biden a proposé de réduire les coûts des médicaments sur ordonnance pour les personnes âgées, de s’attaquer aux monopoles dans le secteur des technologies et de limiter les fusions bancaires. Trump a suggéré de renverser la réglementation qui limite l’utilisation des combustibles fossiles et il est probable qu’il ira de l’avant avec la construction de pipelines. Chaque politique aurait des répercussions variées sur les sociétés dans ces secteurs.

Conclusions

Les politiques de chaque candidat limiteraient (par la réglementation, les droits de douane, l’immigration) et soutiendraient alternativement la croissance (par les dépenses d’infrastructures). Dans un cas comme dans l’autre, il est presque certain que les déficits continueront de s’alourdir (en raison de l’augmentation des dépenses, des engagements pris à l’égard des programmes de sécurité sociale et des baisses d’impôt). Les politiques des deux candidats devraient également contribuer à la poussée de l’inflation (à cause des droits de douane, des baisses d’impôt et de la hausse des dépenses budgétaires). Il n’est pas certain que Trump soit perçu comme étant favorable au milieu des affaires. Les baisses d’impôt et la déréglementation de 2016 sont déjà prises en compte dans les attentes, tandis que ses nouvelles politiques pourraient ne pas être aussi favorables pour les entreprises. Enfin, l’augmentation des émissions de titres de créance et de titres du Trésor ne sera que légèrement atténuée par la récente annonce de la Fed visant à ralentir le resserrement quantitatif, et nous continuons à surveiller de près l’humeur des investisseurs à cet égard. Nous continuons aussi à suivre l’évolution de l’élection et à gérer les portefeuilles conformément à notre philosophie de placement selon laquelle les paramètres fondamentaux comptent dans l’évaluation des titres.

Marchés financiers

Le ton du marché est optimiste depuis le début de l’année grâce à des données sur l’économie et l’inflation plus solides. Malgré ces bonnes nouvelles, les banques centrales ont généralement maintenu une politique expansionniste, la Banque nationale suisse devenant la première banque centrale du G10 à réduire les taux d’intérêt au cours du présent cycle. On s’attendait par conséquent à un atterrissage en douceur, ce qui a fait fortement progresser les actions mondiales. Pour la première fois depuis plus de dix ans, l’indice S&P 500 a enregistré des gains importants pendant plusieurs trimestres consécutifs, clôturant le premier trimestre avec une hausse de 10,6 %. Ailleurs, même les taux directeurs plus élevés n’ont pas assombri l’humeur, alors que la Banque du Japon a réagi au raffermissement de la conjoncture économique et à l’inflation en mettant fin à sa politique de taux d’intérêt négatifs, tout en rassurant les marchés sur la persistance des faibles taux d’intérêt. Par conséquent, même si les taux directeurs ont augmenté, le yen s’est révélé la monnaie la moins performante au sein du G10, atteignant un creux intrajournalier de 160 par rapport au dollar américain pour la première fois depuis 1990. L’indice Nikkei a toutefois bien réagi à la politique toujours expansionniste et a enregistré son meilleur rendement trimestriel depuis 2009, progressant de 21,4 % et dépassant finalement son sommet de 1989. Les actions ont affiché des gains à l’échelle mondiale et grimpé de façon constante semaine après semaine. D’autres catégories d’actif ont participé à la remontée : les écarts des obligations de sociétés se sont considérablement resserrés, à commencer par les obligations à haut rendement , les prix du pétrole ont bondi (hausse de 16,1 % du WTI) tout comme l’or (hausse de 8,1 %). Le dollar américain s’est apprécié par rapport à toutes les monnaies du G10 et l’indice du dollar a avancé de 3,1 % au cours du trimestre.

L’enthousiasme est toutefois retombé en avril, la plupart des actifs risqués perdant un peu de terrain. Les participants aux marchés ont commencé à s’inquiéter des constantes hausses inattendues de l’inflation aux États-Unis, qui ont clairement montré une tendance dans la mauvaise direction pour la Fed. Les marchés obligataires ont revu à la baisse leurs attentes quant aux baisses de taux de la Fed. Ils anticipaient à la fin d’avril une ou deux baisses pour 2024, comparativement à six ou sept en début d’année; les taux d’intérêt ont augmenté dans l’ensemble de la structure des échéances. L’indice des obligations universelles FTSE Canada a reculé de 1,2 % au premier trimestre et de 2 % en avril. La hausse de l’inflation a repoussé la première baisse de taux à septembre et les taux des obligations du Trésor américain à 10 ans ont augmenté d’environ 90 points de base au total depuis le début de l’année. Les actions se sont repliées et l’indice S&P 500 a cédé 4,1 % en avril, après cinq mois consécutifs de gains. Les titres des « sept magnifiques » ont participé au repli, mais ont surpassé l’indice général, reculant de 2,3 % au cours du mois. Depuis le début du trimestre, les sociétés au sein de l’indice S&P 500 ont déclaré de solides bénéfices se situant entre 6 % et 10 %. Pourtant, les cours n’ont pas réagi positivement à ces résultats, car les valorisations ont commencé à être remises en question par la hausse des taux d’intérêt. Les sociétés dont les marges d’exploitation se sont resserrées ont été particulièrement vulnérables à la faiblesse des cours, les investisseurs recherchant des sociétés de qualité supérieure.

Stratégie de portefeuille

Les investisseurs sont de plus en plus préoccupés par la recrudescence de l’inflation aux États-Unis. Même si la Fed a déclaré qu’elle allait probablement baisser les taux à sa prochaine intervention, il sera de plus en plus difficile de maîtriser l’inflation tant que l’économie restera vigoureuse. Les États-Unis se distinguent des autres pays, et la prochaine élection pourrait entraîner des changements de politique relativement à la réglementation et à la gestion budgétaire qui auront une incidence sur les niveaux d’endettement et l’inflation.

Au Canada, la situation est claire : les ménages, les entreprises et le gouvernement ressentent tous le poids de la hausse des taux d’intérêt sur les niveaux d’endettement élevés. Le coussin de sécurité des Canadiens augmente et les engagements à l’égard de projets et d’achats importants diminuent. La Banque du Canada devrait donc commencer sa campagne d’assouplissement de la politique monétaire au cours des prochains mois. Étant donné que les taux canadiens ont suivi la trajectoire à la hausse des taux américains, nous croyons que les taux actuels atteindront un sommet à court terme.

Dans les portefeuilles équilibrés, nous avons réduit la sous-pondération des actions et, après la hausse des taux d’intérêt en avril, nous avons ramené la sous-pondération des titres à revenu fixe à un niveau neutre. Nous continuons à sous-pondérer les actions, car nous prévoyons que les taux d’intérêt élevés exerceront des pressions sur les valorisations. Nous continuons également à surpondérer légèrement les liquidités, car les rendements demeurent attrayants. Les portefeuilles de titres à revenu fixe ont une durée et une répartition sectorielle relativement neutres, la surpondération des obligations provinciales compensant la légère sous-pondération des obligations de sociétés dont les écarts sont faibles (les valorisations sont élevées). Les portefeuilles d’actions fondamentales ont réduit leurs placements défensifs et privilégié les sociétés qui enregistrent des rendements supérieurs dans des cycles industriels robustes, en raison de l’amélioration des données sur le secteur manufacturier mondial. Les sociétés liées aux matières premières et les fabricants industriels figurent parmi les positions surpondérées. Nous continuerons de suivre la campagne électorale aux États-Unis et nous évaluerons ses incidences sur nos perspectives fondamentales, ainsi que celles de l’évolution de la trajectoire de l’activité économique, de l’inflation et des politiques.

Deux personnes font de la randonnée au sommet d’une montagne pendant un coucher de soleil hivernal. Mount Harvey, North Vancouver, C.-B., Canada.

 

Au cœur de notre organisation se trouvent l’engagement et le désir d’offrir un rendement et un service supérieurs à nos clients. Notre principal objectif est de répondre aux attentes de nos clients tout en nous assurant que notre équipe est très motivée et enthousiaste. Pour y arriver, nous nous concentrons sur ce que nous faisons de mieux tout en cherchant à demeurer à l’avant-garde de la recherche et du développement sur les marchés des capitaux.

Investir dans nos futurs leaders

Une fois par année, nous présentons à nos clients une revue annuelle de l’entreprise, décrivant comment nous orientons nos efforts au sein de CC&L pour nous assurer que nous sommes prêts à respecter notre engagement à l’égard du rendement des placements et des objectifs de service pour nos clients.

Ces dernières années ont été une période de transformation et de croissance chez CC&L. Nos équipes ont pris de l’expansion alors que nous bâtissons la prochaine génération de dirigeants. Nous avons atteint nos objectifs de placement pour la plupart de nos stratégies, ce qui contribue à la croissance de l’actif. Plus particulièrement, l’expansion de nos capacités d’analyse quantitative des actions, et l’élargissement de notre offre des stratégies en actions et de notre clientèle ont considérablement transformé nos activités. Cette croissance nous incite à réfléchir à la façon de positionner nos activités pour la prochaine décennie.

Nos employés sont le fondement de notre société et notre capital intellectuel est notre ressource la plus précieuse. Nous demeurons déterminés à investir dans nos équipes; et grâce à la planification du perfectionnement professionnel et aux programmes de formation en leadership, nous cherchons à approfondir les connaissances et à élargir le savoir-faire de nos équipes, tout en renforçant nos processus de placement et en planifiant la relève.

À l’appui du perfectionnement des talents, l’initiative de Leadership au féminin de CC&L a été lancée en 2021; elle est dirigée par un comité composé en majorité de femmes au sein de l’organisation, et vise à cerner et à régler les problèmes qui contribuent au déséquilibre entre les sexes en matière de leadership au sein de notre organisation, de notre industrie et de notre société.

Nous croyons (selon des études universitaires, des recherches de l’industrie et des expériences personnelles) que ce déséquilibre découle d’influences sociétales, de la complaisance et des préjugés inconscients. Même si les statistiques à l’égard du déséquilibre entre les sexes dans les postes de direction sont décourageantes, nous croyons que nous pouvons apporter des changements au moyen de mesures réfléchies et coordonnées. Si nous réussissons à nous attaquer aux principales causes du déséquilibre entre les sexes en matière de leadership, nous pourrons considérablement élargir le bassin de talents à partir duquel les grands leaders émergent, améliorant ainsi les résultats.

Un résultat important – et inattendu – de nos efforts est que les solutions identifiées pour le déséquilibre entre les sexes en matière de leadership sont aussi des solutions qui s’appliquent à des enjeux plus larges et qui peuvent être profitables à tous. En 2023, nous avons commencé à mettre en œuvre les solutions recommandées par le comité de leadership au féminin. Pour en savoir plus, veuillez lire notre document d’information Leadership au féminin.

Au cours de la dernière année, une autre initiative importante a été un projet visant à favoriser une culture de rétroaction continue en temps réel, stimulant l’innovation, la croissance professionnelle et la motivation. Selon nous, la rétroaction est essentielle au succès individuel et collectif. Dans notre secteur concurrentiel, il est essentiel de remettre en question le statu quo, d’innover et de prendre des risques. Pour atteindre notre plein potentiel, nous devons recevoir une rétroaction constructive pour nous améliorer. Cette conviction nous a amenés à investir dans un programme de perfectionnement à l’échelle de l’entreprise, animé par un consultant indépendant, afin de cultiver et de renforcer une culture de rétroaction et d’innovation. Ce processus a commencé par une rencontre hors site pour en arriver à une vision commune de notre culture de rétroaction et s’est poursuivi par six ateliers visant à acquérir des connaissances et des compétences de base et à intégrer des pratiques de rétroaction. Ce projet de dix mois représente une étape importante de nos efforts continus visant à améliorer notre culture, nos compétences et nos processus en matière de leadership.

En 2024, nous chercherons à améliorer les pratiques de gestion des congés parentaux et d’encadrement professionnel.

En terminant, je tiens à remercier nos clients de leur confiance et de leur partenariat soutenu.

Sincères salutations,


Martin Gerber
Président et chef des placements

Notre équipe

Nos équipes ont continué de prendre de l’expansion en 2023. CC&L a accueilli 25 nouveaux employés, ce qui a fait grossir son équipe de 18 employés pour l’année et porté son effectif à 135 personnes. Nos activités profitent également des 410 employés du Groupe financier CC&L, qui soutiennent la gestion des affaires, l’exploitation, le marketing et la distribution.

La stabilité et les spécialisations de notre société demeurent les principaux moteurs de nos activités. La clé de notre succès réside dans une planification approfondie de la relève et une approche rigoureuse en matière de perfectionnement professionnel. Notre processus rigoureux de revue annuelle nous permet d’identifier les réalisations, les tendances et les points à améliorer.

Nous sommes heureux d’annoncer que plusieurs employés ont été promus au poste de directeur principal à compter du 1er janvier 2024 en reconnaissance de leur contribution importante et croissante à notre société.

Kathryn Alexander, Chang Ding, Adriana Gelbert, Jeremy Gill, Chris Holley, Richard Hsia, Jason Li, Conrad Ng, Bradley Pick, Diana Prenovost, Dana Russell, Ian Tai, James Wasteneys, Albert Wong, Yegor Zadniprovskyy.

Le conseil d’administration de CC&L est heureux d’annoncer qu’à compter du 1er janvier 2024, les personnes suivantes ont été promues, devenant actionnaires de la société, en reconnaissance de leur leadership et de leur influence dans leurs fonctions.

Kathryn Alexander, Lisa Conroy, Jack Ferris, Ted Huang, Calum Mackenzie.

Titres à revenu fixe

Au cours des deux dernières années, Brian Eby, gestionnaire de portefeuille, Stratégie macroéconomique, a mis en œuvre la dernière étape de son plan de relève, travaillant en étroite collaboration avec TJ Sutter dans un rôle de mentorat, effectuant la transition de l’analyse macroéconomique, des prévisions et des décisions de portefeuille. Après 25 ans chez CC&L, Brian prendra sa retraite le 30 juin 2024.

Brian Eby

Gestion de placements Connor, Clark & Lunn se réjouit d’annoncer que TJ Sutter, CFA, a été promu au poste de cochef de l’équipe des titres à revenu fixe. TJ a joint la firme en février 2021 après avoir passé dix ans chez RBC Marchés des Capitaux où il était directeur et chef régional du groupe des titres à revenu fixe, des devises et des produits de base. Auparavant chez RBC, TJ était responsable de la mise en oeuvre des stratégies de risque liées aux placements et dirigeait une équipe de neuf négociateurs et représentants, tout en supervisant les relations avec certains des plus importants clients de la banque. Au sein de CC&L, TJ a acquis une solide expérience en tant que macro-stratège de l’équipe des titres à revenu fixe. TJ travaillera en étroite collaboration avec David George dans le rôle de cochef de l’équipe pour les deux prochaines années, alors que David s’apprête à prendre sa retraite.

Les performances de l’équipe des titres à revenu fixe témoignent de l’excellent travail réalisé par David au cours de son mandat pour bien former et développer les professionnels des placements. Avec les autres associés, il a formé un groupe talentueux qui continuera à se développer et qui aura l’occasion d’élargir leur rôle au cours des deux prochaines années. Le soutien de David au cours de cette période facilitera une transition en douceur des rôles et des responsabilités, ce qui nous permettra de continuer à répondre avec succès aux objectifs de placement de nos clients.

David George  TJ Sutter

Ted Huang, analyste quantitatif qui s’est joint à l’équipe des titres à revenu fixe en 2018 et qui est devenu directeur principal en 2021, a été nommé actionnaire cette année. La combinaison de ses solides compétences en analyse quantitative et de son expérience pratique des titres à revenu fixe a été très précieuse pour trouver des sources uniques de valeur ajoutée sur le marché obligataire.

Stratégies fondamentales d’actions

Brian Milne est devenu gestionnaire de portefeuille, couvrant le secteur de l’énergie, en remplacement de Mark Bridges, qui a pris sa retraite de CC&L le 31 décembre 2023. Brian couvre le secteur de l’énergie pour les actions et les titres de créance depuis 13 ans. Il est actionnaire et ancien analyste de crédit principal responsable des titres de créance énergétiques pour l’équipe des titres à revenu fixe, où il a collaboré avec Mark dans le secteur de l’énergie.

Brian Milne

Michael McPhillips a été nommé chef de la recherche fondamentale sur les actions le 31 décembre 2023, après le départ à la retraite de Mark Bridges. Michael est actionnaire et compte plus de 10 ans d’expérience. Il est membre de l’équipe d’analyse fondamentale des actions depuis 2013.

Michael McPhillips

L’équipe se concentre sur le développement de la prochaine génération de leaders en placement et est heureuse d’annoncer la nomination de trois personnes comme actionnaires :

Lisa Conroy s’est jointe à l’équipe Stratégies fondamentales d’actions en 2013 à titre d’analyste couvrant un certain nombre de secteurs du marché boursier canadien. Lisa est devenue directrice principale en 2022 et a assumé des responsabilités croissantes axée sur le soutien des clients de CC&L en tant que spécialiste des produits en ce qui a trait à la stratégie et au positionnement des portefeuilles.

Kathryn Alexander s’est jointe à la société en 2017 à titre d’associée de recherche spécialisée dans les sociétés des secteurs de l’industrie et des services financiers diversifiés. Elle a assumé des responsabilités croissantes au fil du temps et a été promue au poste de directrice principale en 2019, avant de décider de prendre une pause pour fonder une famille. Nous étions ravis de l’accueillir de nouveau en 2023 et elle s’est rapidement adaptée. Elle couvre maintenant, entre autres, les sociétés des secteurs des infrastructures énergétiques, des télécommunications et des produits forestiers, et elle apprend aussi à devenir gestionnaire de portefeuille principale.

Jack Ferris s’est joint à la société en 2022 à titre d’associé de recherche spécialisé dans les sociétés du secteur des matériaux. Il est devenu directeur principal en 2023. Après avoir rapidement maîtrisé ce secteur, il s’est concentré sur les sociétés du secteur des biens de la consommation de base. En plus de faire des recherches sur les sociétés, Jack apprend à devenir gestionnaire de portefeuille principal.

Stratégies quantitatives d’actions

Jennifer Drake a terminé sa transition au poste de cochef de l’équipe Stratégies quantitatives d’actions le 1er janvier 2024. Jenny a assumé la responsabilité principale de la stratégie d’affaires et d’équipe, en collaboration avec Steven Huang, qui continue de diriger la stratégie de placement.

Jennifer Drake  Steven Huang

L’équipe continue de croître, ajoutant du personnel à toutes les sous-équipes en 2023, avec environ 10 nouveaux employés, ce qui porte l’équipe à 72 membres. Le plan consiste à continuer d’investir dans les ressources de leadership des sous-équipes à un rythme similaire cette année.

Kyle Ingham, responsable de la sous-équipe de gestion du processus de placement des stratégies quantitatives, est passé à un poste stratégique, soit celui de chef des opérations de gestion de placements, à compter du 1er janvier 2024. La sous-équipe de gestion du processus de placement des stratégies quantitatives passe à un modèle de cogestion dirigé par Cam MacDonald et Chris Holley.

Solutions clients

L’équipe ajoute des membres à sa direction en vue de la relève de Phillip Cotterill au cours des prochaines années. Calum Mackenzie s’est joint à la société en juillet 2023, apportant une expérience appréciable acquise dans des postes de direction antérieurs et contribuant de plus en plus aux discussions stratégiques de l’équipe. Il est devenu directeur principal en 2023 et actionnaire cette année.

Diana Prenovost s’est jointe à nous en janvier 2023, travaillant aux côtés de Johanne Bouchard, gestionnaire des relations avec les clients, qui prendra sa retraite le 31 décembre 2024, après 18 ans au service de la société. Diana a été promue au poste de directrice principale cette année et est « la première employée permanente de Gestion de placements Connor Clark & Lunn » à notre bureau de Montréal.

Diana-Prenovost  Johanne Bouchard

Opérations de gestion de placements

À titre de chef des opérations de gestion de placements, Kyle Ingham est responsable de la direction stratégique des opérations de gestion de placements et relève directement du président et chef des placements. Kyle est actionnaire qui assure la relève de Lee Damji et gère la sous-équipe de gestion du processus de placement des Stratégies quantitatives d’actions. Lee travaille à Connor Clark & Lunn depuis 26 ans, en tant que chef de l’équipe des systèmes d’information du Groupe financier Connor, Clark & Lunn pendant 20 ans et directeur général des opérations pendant 2 ans, jusqu’en 2019, date à laquelle il a rejoint Gestion de placements Connor Clark & Lunn pour assumer ce nouveau rôle. Il continue à jouer un rôle de conseiller et de mentor pour le développement du leadership. Il prévoit de prendre sa retraite le 31 décembre 2024.

Kyle Ingham  Lee Damji

Investissement responsable

La fiche d’évaluation des PRI pour 2023 de CC&L reflète plusieurs améliorations dans nos activités ESG. Nous sommes maintenant classés à un niveau égal ou supérieur à la médiane dans toutes les catégories d’évaluation.

Le comité ESG a effectué un examen de nos pratiques ESG en 2022 et 2023 et a établi des priorités quant à plusieurs domaines à améliorer. Un plan de projet, qui comprend des améliorations à la formation sur les facteurs ESG, à la production de rapports et aux capacités d’engagement à l’extérieur du Canada, sera mis en œuvre en 2024.

Nouvelles de l’entreprise

Actif géré

L’actif sous gestion (ASG) de CC&L a augmenté de 10 milliards de dollars canadiens en 2023 pour s’établir à 64 milliards de dollars canadiens au 31 décembre 2023. Nous sommes heureux d’annoncer que nous poursuivons notre croissance grâce aux mandats de nouveaux clients répartis dans toutes les équipes de placement. En 2023, CC&L a accueilli 21 nouveaux clients et a obtenu cinq nouveaux mandats de clients existants totalisant 2,6 milliards de dollars canadiens. Les nouveaux mandats sont pour la plupart des mandats d’analyse quantitative d’actions étrangères confiés par des investisseurs institutionnels à l’extérieur du Canada.

Par type de mandat*. Stratégies fondamentalesen actions canadiennes : 18 %. Stratégies quantitatives en actions : 50 %. Titres à revenu fixe : 16 %. Multi-stratégies : 16 %. Par type de client*. Caisses de retraite : 33 169 $. Fondations et fonds de dotation : 2 468 $. Autres institutions : 9 060 $. Particuliers : 11 882 $. Clients privés : 7 764 $. *Actif total sous gestion CAD $ au 31 décembre 2023.

Mise à jour sur les produits

Nous lançons une nouvelle stratégie de titres à revenu fixe de base plus en 2024 qui comprendra la stratégie de titres à revenu fixe de base de CC&L ainsi que des placements dans des prêts hypothécaires et des titres de créance de marchés émergents gérés par des équipes affiliées au sein du Groupe financier CC&L.

La distribution aux États-Unis des stratégies quantitatives d’actions de CC&L a été augmentée au moyen d’une plateforme de fiducie de placement collectif (CIT) pour les régimes de retraite réglementés par l’Employee Retirement Income Security Act (ERISA). La Q Emerging Markets Equity CIT a été lancée en janvier et les Q Global et Q International Equity CIT seront également lancées cette année.

La plateforme des fonds de structure OPCVM (basée en Irlande) de CC&L s’agrandit également cette année avec l’ajout des fonds d’actions mondiales Q et d’actions mondiales à petite capitalisation Q.

Mot de la fin

Nous tenons à remercier nos clients et nos partenaires d’affaires pour leur soutien et espérons continuer de vous aider à atteindre vos objectifs de placement.

Une femme regardant l'océan Pacifique pendant un coucher de soleil alors qu'elle s'appuie sur une balustrade. Elle porte des vêtements d'hiver et il y a des montagnes au loin derrière elle.

Les Prévisions de cette année analysent les thèmes à long terme qui façonnent nos perspectives pour les marchés financiers et les facteurs cycliques à court terme qui influent sur la croissance économique, l’inflation et la politique monétaire. Nous évaluons les valorisations boursières et, en tenant compte de tous ces facteurs, nous établissons le cadre de notre stratégie de portefeuille.

Cette année, les mises à jour de nos Prévisions seront présentées dans notre publication trimestrielle Perspectives.

Introduction

Nos Prévisions pour 2023 avaient pour thème principal « un cycle court et une récession de courte durée ». À la lumière de ce que nous savons aujourd’hui, nos perspectives et nos prévisions étaient trop prudentes pour 2023. Dans l’ensemble, nous nous attendions à une modérée performance économique au Canada, en Chine et en Europe, et c’est ce qui s’est en grande partie concrétisé. Toutefois, nous avons sous-estimé la résilience de l’économie américaine, en particulier l’incidence des transferts budgétaires visant à soutenir les bilans des consommateurs, l’utilisation de l’épargne excédentaire ainsi que la demande de main-d’œuvre des entreprises, qui a maintenu le marché de l’emploi à flot. La croissance économique aux États-Unis a terminé 2023 avec une accélération d’environ 2,5 %. Au Canada, l’accroissement de la population a stimulé la demande et l’activité économique globale (le PIB global devrait atteindre environ 1,2 %), mais le PIB par habitant a déçu (voir les Perspectives de décembre). Nous nous attendions à ce que les banques centrales aient besoin d’orchestrer un ralentissement pour lutter contre l’inflation, en fixant la probabilité d’une récession aux deux tiers environ à son sommet. En effet, notre principal scénario de risque était une hausse inattendue de l’inflation, en raison de la difficulté de rééquilibrer les marchés de l’emploi exceptionnellement serrés. Par le passé, lorsque l’inflation atteignait 5 %, il fallait habituellement plus d’un an et un ralentissement économique pour s’en sortir. Les prévisions de récession de l’an dernier étaient si universelles que les prévisions annuelles du PIB américain pour le quatrième trimestre de 2022 se sont classées au quatrième rang dans les 55 dernières années d’études économiques menées par The Economist. Contrairement aux attentes, nous avons été touchés par la résilience de l’économie et la décélération de l’inflation sans un repli plus important. L’économie a résisté au resserrement des conditions financières, ce qui nous rappelle en partie les longs décalages associés à la politique monétaire, mais aussi le rôle que les politiques colossales ont joué pour soutenir l’économie pendant la pandémie.

Les actions et les obligations ont clôturé l’année avec des gains importants, se redressant après une année 2022 lamentable. L’indice composé S&P/TSX a connu une année volatile, mais a terminé en hausse de 11,8 %. Les actions mondiales se sont encore mieux comportées, l’indice MSCI Monde tous pays progressant de 18,9 % pour l’année, mené par les actions américaines. L’indice S&P 500 a progressé de 24 % pour clôturer à 4780, dépassant notre prévision d’un gain plus modéré de 8 %. Nous avons raté la cible en raison de l’optimisme débordant des investisseurs, qui ont fortement favorisé les titres à mégacapitalisation des « sept géants », que sont Alphabet, Amazon, Apple, Meta, Microsoft, Nvidia et Tesla, puisque l’intelligence artificielle (IA) est passée dans le courant dominant, ce qui a fait grimper les ratios C/B au-delà des niveaux surévalués de l’an dernier. En particulier, seulement trois secteurs ont surpassé leurs valorisations de l’année précédente : les technologies de l’information, les services de télécommunications et la consommation discrétionnaire. Le rendement supérieur attendu des actions défensives et des obligations de sociétés ne s’est pas matérialisé. L’indice S&P/TSX, qui est fortement pondéré en titres versant des dividendes plus élevés dans les services financiers, les télécommunications et les FPI, a éprouvé des difficultés en raison des taux d’intérêt à long terme plus élevés.

Les marchés obligataires ont également connu d’importantes fluctuations, mais ils ont essentiellement tracé une grande boucle au cours de l’année étant donné que les taux des obligations à 10 ans aux États-Unis et au Canada ont clôturé la période très près de leurs valeurs d’ouverture. Les mois de novembre et de décembre ont été parmi les meilleurs mois pour les obligations mondiales depuis 2008, car le refrènement de l’inflation a permis aux banques centrales de commencer à parler des baisses de taux potentielles. Nos prévisions étaient trop prudentes – un rendement attendu d’environ 2 % à 5 % –, tandis que l’indice des obligations universelles FTSE Canada a terminé l’année en hausse de 6,7 %. Les marchés financiers ont connu d’importantes fluctuations tout au long de l’année, en réaction à l’évolution rapide des attentes et de l’humeur des investisseurs, et notre positionnement a été influencé par ces points de vue. Il en est résulté des rendements absolus très positifs pour les investisseurs et, malgré des prévisions décevantes, bon nombre de nos stratégies de sélection de titres se sont bien comportées dans l’ensemble.

Même si les prévisions de croissance de l’an dernier se sont révélées excessivement prudentes et celles de l’inflation exagérément inquiétantes, nous prenons maintenant en compte ces facteurs pour 2024. Dans les pages suivantes, nous évaluons les thèmes à long terme sous-jacents tout en tenant compte des influences cycliques au premier plan. Nous observons toujours des pressions inflationnistes à long terme, mais nous constatons maintenant une possible reprise de la productivité qui pourrait procurer un certain équilibre. À court terme, tout comme nous avions commencé l’année 2023 avec conviction quant à nos perspectives d’une récession, nous commençons l’année 2024 avec la forte conviction que les autorités monétaires peuvent orchestrer un scénario d’atterrissage en douceur. Même si bon nombre d’investisseurs sont prêts à rajuster leurs portefeuilles en réaction à une récession attendue depuis longtemps (p. ex., le côté de la croissance en cas d’erreur quant à un atterrissage en douceur), on ne sait pas trop dans quelle mesure les investisseurs seront prêts à réagir si l’inflation est mal évaluée.

Graphique 1 : La croissance a surpassé les attentes

Source : Bloomberg

 

Graphique 2 : L’inflation de base a diminué partout

Sources : Statistique Canada, Statistics Sweden (SCB), Office fédéral de la statistique de Suisse, Office for National Statistics (ONS) du Royaume-Uni, Bureau of Labor Statistics (BLS) des États-Unis, Eurostat, Australian Bureau of Statistics, Macrobond.

La conjoncture à long terme

Nous croyons que l’ère de la stagnation à long terme est derrière nous. Au cours de cette période, les risques géopolitiques ont été faibles et les sociétés ont profité de solutions de rechange à faibles coûts grâce à la mondialisation et ont eu recours à des chaînes d’approvisionnement de plus en plus complexes. Nos thèmes à long terme laissent entrevoir un passage d’un contexte caractérisé par une désinflation généralisée à un contexte où l’inflation soutenue, plus qu’une réaction cyclique temporaire, pose des défis aux autorités monétaires. Toutefois, nous commençons nos thèmes à long terme par un nouveau développement qui pourrait compenser les pressions inflationnistes généralisées découlant de nos autres thèmes à long terme.

1. L’intelligence artificielle et, par voie de conséquence, la productivité redéfiniront notre monde

  • On se souviendra peut-être de 2023 comme de l’année où l’IA est entrée dans le courant dominant, en particulier grâce à des outils d’IA générative fondés sur de grands modèles de langage, comme DALL-E, Character AI, Bard et ChatGPT. Leur applicabilité généralisée, leur facilité d’utilisation et leurs interactions humanoïdes faciliteront leur adoption.
  • Si, l’an dernier, les entreprises testaient et réfléchissaient aux utilisations de l’IA, elles chercheront à l’intégrer dans leurs activités au cours des prochaines années. Par conséquent, de nombreux emplois actuels seront transformés ou deviendront inutiles. Selon les recherches, l’IA pourrait exécuter ou soutenir entre un quart et la moitié des emplois actuels. Comme pour les progrès technologiques passés, l’IA devrait aussi créer de nouveaux emplois qui n’existent pas aujourd’hui.
  • La capacité de générer une croissance sans inflation dépend de la productivité. Cette situation revêt une grande importance parce que les marchés du travail des pays développés se contractent avec les changements démographiques. Les gains de l’IA devraient être plus rapides que ceux des technologies antérieures comme les ordinateurs personnels, Internet, les appareils mobiles et l’infonuagique, qui ont mis des années à se refléter dans les données officielles. Les effets de l’IA devraient être plus rapides cette fois-ci; l’adoption se fera en douceur grâce à l’interface humanoïde, à la grande applicabilité et à l’attention accordée à un large éventail de secteurs.
  • L’IA a été un thème dominant du marché en 2023. Les sociétés technologiques, qui fournissent du matériel, des modèles et des infrastructures et qui intègrent énergiquement l’IA à leurs activités, ont été les principales bénéficiaires. Nous analyserons les sociétés selon un continuum d’adoption. Les sociétés les plus directement touchées seront celles qui développent l’IA, qui entraînent les modèles et les adaptent aux applications commerciales. L’impact sera plus fort aux États-Unis en raison de son secteur technologique florissant, du soutien et des mesures incitatives du gouvernement, ainsi que des flux de trésorerie à investir. Plus loin dans le continuum, il y aura les entreprises qui permettront au secteur de l’intelligence artificielle de prospérer, grâce à la fabrication de matériel ou à la fourniture d’infrastructures comme la production d’énergie et les centres de données. Enfin, il y aura des sociétés qui seront prêtes à adopter des nouveautés dès leur mise en marché et qui profiteront de l’amélioration des marges bénéficiaires et de la hausse du chiffre d’affaires.

Graphique 3 : La plupart des emplois évoluent en fonction de l’innovation

Source : AUTOR, David. « The Labor Market Impacts of Technological Change: From Unbridled Enthusiasm to Qualified Optimism to Vast Uncertainty », document de travail no 30074, NBER.

 

Graphique 4 : Les dépenses en immobilisations dans le secteur manufacturier stimulent les investissements des entreprises

Remarque : La catégorie « Autres » comprend les soins de santé, l’éducation, les loisirs et le divertissement, l’hébergement et la religion.
Sources : Census Bureau des États-Unis, Macrobond, Gestion de placements CC&L.

 

2. Cycle d’investissement des capitaux

  • Les investissements des entreprises ont fait bonne figure en 2023, progressant d’environ 4 % aux États-Unis, malgré la hausse des taux d’intérêt. Les investissements dans les structures ont particulièrement bondi, progressant de 30,3 % au premier trimestre, et, selon les données les plus récentes, ils ont augmenté de 13,7 % sur 12 mois, un sommet inégalé en dix ans, étant donné que les entreprises ont profité d’un éventail de subventions gouvernementales. Les mesures de relance budgétaire ont délaissé la consommation (p. ex., crédits d’impôt des employeurs, chèques, report des prêts étudiants, plafonnement des loyers) pour privilégier l’investissement dans les infrastructures du secteur privé (sous le régime de l’Infrastructure Investment and Jobs Act [IIJA]), dans l’énergie propre (sous le régime de l’Inflation Reduction Act) et dans le secteur manufacturier de la haute technologie (dans le cadre de la CHIPS and Science Act).
  • Les infrastructures publiques ont souffert du sous-investissement, et les administrations publiques ont amorcé leur renouvellement, les investissements du gouvernement américain ayant augmenté de 10 % sur 12 mois jusqu’au troisième trimestre de 2023. L’IIJA de novembre 2021 a doublé le montant des dépenses dans un plan quinquennal normal de dépenses, mais la mise en œuvre de ces projets de construction prend du temps. Les dépenses, amorcées en 2023, devraient se poursuivre en 2024.
  • Plusieurs facteurs devraient stimuler les dépenses en immobilisations à l’échelle mondiale. Premièrement, la transition vers un monde carboneutre se fait de plus en plus urgente. L’Europe réduira sa dépendance énergétique aux sources externes, et tous les pays ajouteront des sources d’énergie renouvelable (hydrogène, énergie solaire, énergie éolienne) et nucléaire. Les matières premières liées à la transition énergétique devraient bien performer. Deuxièmement, le commerce international et les chaînes d’approvisionnement sont en cours de réorganisation à l’échelle mondiale. Les marchés émergents se négocient de plus en plus bilatéralement dans leur propre monnaie plutôt qu’en dollars américains. L’Occident s’oriente vers la délocalisation intérieure d’entreprises manufacturières, ce qui réduit sa dépendance à l’égard des sources orientales. Cette démondialisation finira par être inflationniste. Enfin, l’intérêt des entreprises pour l’IA est énorme. Les données tirées des sondages, les annonces de bénéfices, les termes de recherche sur Internet et les offres d’emploi mentionnant des compétences liées à l’IA portent à croire que les dépenses en immobilisations prévues importantes devraient stimuler les dépenses en machinerie, en équipement et en propriété intellectuelle.

Graphique 5 : Les récents projets de loi budgétaires devraient accroître le déficit au cours des prochaines années

Remarque : Creating Helpful Incentives to Produce Semiconductors (CHIPS) and Science Act; Infrastructure Investment and Jobs Act; Inflation Reduction Act.
La valeur positive correspond à une réduction du déficit, et la valeur négative, à une augmentation du déficit.
Sources : Congressional Budget Office, Macrobond, Gestion de placements CC&L.

 

Graphique 6 : Jusqu’où les taux directeurs peuvent-ils monter alors qu’il y a une dette à rembourser?

Graphique linéaire montrant la dette publique et les coûts d’intérêts nets élevés des États-Unis en pourcentage du PIB, qui devraient augmenter au cours des dix prochaines années, ce qui remet en question la faisabilité d’une hausse des taux directeurs dans un contexte d’endettement croissant.

Remarque : La zone ombrée correspond aux prévisions sur 10 ans du CBO.
Sources : Congressional Budget Office, Macrobond, Gestion de placements CC&L.

 

3. L’ère de la domination de la politique budgétaire

  • Les gouvernements ont considéré les dépenses budgétaires comme un puissant outil de gestion de crise. Bien que cette situation ait amélioré la résilience économique, elle a pour effet de subjuguer la politique monétaire pour répondre à des besoins budgétaires, un concept connu comme étant une domination de la politique budgétaire (reportez-vous à nos Perspectives de septembre pour plus de détails). Le budget britannique de septembre 2022, qui a déclenché des bouleversements sur les marchés obligataires, en est un bon exemple. La Banque d’Angleterre a réagi en procédant à des achats illimités d’obligations d’État afin de stabiliser les marchés et de rétablir l’inflation.
  • Aux États-Unis, une série de paiements d’allègement liés à la COVID-19, financés par de nouveaux emprunts sans compensation des revenus, a fait passer la dette nationale américaine à 34 000 milliards de dollars, un montant sans précédent, par rapport à 31 400 milliards de dollars au début de 2023. Le déficit de l’an dernier a presque doublé par rapport à 2022, en raison des dépenses gouvernementales qui sont demeurées supérieures aux niveaux de 2019, de la réduction des recettes fiscales et, surtout, l’augmentation des frais d’intérêt pour le service de la dette. L’augmentation de 2 500 milliards de dollars de la dette fédérale sur un an représente une croissance supérieure au PIB et est survenue au moment le plus inutile, soit lorsque l’économie est en période de plein emploi. Cette situation insoutenable présente un risque de hausse de l’inflation ou d’austérité budgétaire. En août, Fitch a abaissé la note de crédit des États-Unis en la faisant passer de AAA à AA+ à un moment où les déficits augmentent en raison des dépenses, les émissions de titres du Trésor américain sont accentuées par le resserrement quantitatif de la Fed et les frais d’intérêt en pourcentage des recettes fiscales dépassent 14, et ce, alors que le coût du service de la dette augmente pour la première fois en près de 40 ans. Dans le but d’éviter les problèmes de liquidité, le Trésor privilégie les bons du Trésor à coûts plus élevés (plus de 5 %), même si l’immobilisation des taux sur de longues périodes était plus rentable.
  • Le résultat probable est une hausse des taux d’intérêt neutres et un accroissement de la volatilité de l’économie et de l’inflation. Les émissions d’obligations augmenteront et les marchés élèveront probablement les primes de durée en conséquence. C’est la fin du marché obligataire baissier de 40 ans et de l’ère de la politique monétaire expansionniste.

La conjoncture cyclique

Monde : Les guerres et les élections divisent, mais la politique d’assouplissement unit le monde

  • L’économie mondiale a déjoué les prévisions d’une récession en 2023. Toutefois, le monde est criblé de dettes en raison d’une répression financière prolongée. Les autorités monétaires cherchent à modérer la croissance à partir d’une demande excédentaire, ce qui indique que nous en sommes aux dernières étapes d’un cycle économique dominé par la politique monétaire. En l’absence d’un assouplissement percutant de la politique monétaire pour favoriser des conditions expansionnistes, il est probable que la croissance continuera de ralentir en 2024. Nous n’avons pas encore observé toutes les répercussions qui surviennent bien après les hausses de taux d’intérêt. La désinflation est apparue plus rapidement dans de nombreux pays et a été atteinte plus facilement que prévu. Les chocs de l’offre à l’échelle mondiale se sont atténués et, en raison du resserrement des conditions financières, ils ont réduit les pressions inflationnistes de façon homogène dans le monde. Même si l’inflation demeure élevée dans le secteur des services, la baisse des prix des produits a changé beaucoup de choses. En somme, les autorités monétaires signalent la fin de leur phase de resserrement et réfléchissent maintenant au moment où elles commenceront à abaisser les taux en vue de les ramener à un niveau neutre.
  • La géopolitique et la politique nationale seront mises à l’épreuve et considérées comme des thèmes d’une grande importance cette année. Les pays s’engagent dans des guerres sur plusieurs fronts, et l’unipolarité et le dividende de paix découlant des échanges commerciaux se sont fracturés. Les échanges commerciaux sont de plus en plus axés sur les pays amis ou alignés politiquement qui sont situés à proximité. Cette année, par exemple, le Mexique et le Canada ont éclipsé la Chine comme source d’importations la plus importante aux États-Unis. De plus, les échanges commerciaux de la Chine avec l’ANASE et l’Amérique latine ont connu une forte augmentation. Fait à souligner, 2024 sera une année record pour les élections démocratiques, étant donné que la moitié de la population mondiale, qui représente près des deux tiers du PIB mondial et 80 % des valorisations boursières mondiales, participera à des élections. Cela inclut des nations comme l’Inde, le Mexique, Taïwan, le Royaume-Unis et les États-Unis.
  • Le FMI prévoit que la croissance mondiale ralentira à 2,9 %, une projection inférieure à la moyenne historique sur 20 ans de 3,8 %. Les marchés émergents devraient générer une bonne partie de la croissance, notamment l’Inde (6 %) et la Chine (4,7 %). Malgré une économie résiliente aux États-Unis, les économies avancées pourraient encore ralentir en raison du désendettement qui s’installe dans les pays lourdement endettés.

Graphique 7 : Rapatriement de la chaîne d’approvisionnement – Les importations américaines en provenance du Canada et du Mexique surpassent celles en provenance de la Chine

Source : Census Bureau des États-Unis.

 

Canada : une récession pour enclencher les baisses de taux

  • À l’instar de leurs voisins américains, les consommateurs canadiens, qui constituent la majeure partie de l’économie, devraient réduire leurs dépenses au cours de la prochaine année. Le fardeau de la dette des Canadiens est élevé par rapport au revenu disponible. Les répercussions des taux d’intérêt élevés prennent du temps à se faire sentir : 47 % des prêts hypothécaires ont été renouvelés à des taux plus élevés, et le reste devrait l’être au cours des deux prochaines années. Les coûts du service de la dette sont déjà revenus à leur niveau le plus élevé depuis 1990. Les taux d’intérêt plus élevés et une demande comprimée l’an dernier (par ex., l’augmentation de 11,8 % sur 12 mois des ventes de véhicules neufs en 2023) indiquent que la croissance du crédit réel des ménages et les dépenses des consommateurs se contracteront. Le repli de la consommation pourrait être allégé par l’épargne et la richesse accumulées, mais cela dépendra aussi en grande partie de la résilience des marchés de l’emploi. Malgré la forte croissance de la population qui améliore l’offre de main-d’œuvre (dont il est question dans nos Perspectives de décembre), l’équilibre des marchés du travail pourrait commencer à être difficile si la création d’emplois ne suit pas le rythme des nouveaux immigrants.
  • Les marchés de l’habitation sont un élément imprévisible. Dans un cycle normal de hausses des taux d’intérêt, le secteur le plus sensible aux taux d’intérêt fléchirait. Toutefois, la croissance de la population, qui est l’une des plus élevée au monde, et l’offre limitée de logements devraient soutenir la demande de logements dans son ensemble (comme nous l’expliquons dans nos Perspectives de juillet). Les mesures d’assouplissement de la Banque du Canada devraient être mises en œuvre plus tôt qu’aux États-Unis, mais elles pourraient être retardées si la baisse des taux hypothécaires ravive la demande excessive de logements. Notre consommation et notre économie semblent beaucoup moins résilientes que celles des États-Unis. Néanmoins, les dépenses en immobilisations des entreprises, soutenues par nos thèmes à long terme, devraient stimuler la productivité. La politique budgétaire pourrait présenter une tendance haussière, car le gouvernement libéral minoritaire pourrait déclencher des élections au cours des deux prochaines années. Bien qu’une récession mondiale puisse réduire légèrement la demande pour les exportations canadiennes, la robustesse de l’économie américaine pourrait avoir un effet compensatoire.
  • L’inflation globale s’est nettement améliorée, passant de 5,9 % sur 12 mois en janvier 2023 à 3,1 % sur 12 mois à la fin de l’année. L’inflation au Canada semble plus persistante que dans d’autres pays, en partie en raison des coûts des logements constamment élevés (ils avaient augmenté de 5,9 % sur 12 mois en novembre 2023), les loyers et les frais d’intérêt des prêts hypothécaires continuant de faire grimper l’inflation. Ces facteurs finiront par contribuer au ralentissement de la demande et à la désinflation des produits et des services non liés aux logements. Toutefois, pour l’instant, les mesures de l’inflation de base demeurent à la limite supérieure de la fourchette cible de la Banque du Canada (IPC de base de 3,4 % sur 12 mois), même si elles montrent des signes de progrès (2,8 % sur une base annualisée de trois mois). Cette tendance sera surveillée de près en cas de changement de momentum.

Graphique 8 : Les versements de la totalité des prêts hypothécaires augmenteront au cours des trois prochaines années

Source : Revue du système financier 2023 de la Banque du Canada.

Graphique 9 : Les coûts de remboursement des dettes hypothécaires ont atteint un sommet record

Sources : Statistique Canada, Macrobond.

 

États-Unis : la sensibilité aux taux d’intérêt diminue et les perspectives d’un ralentissement s’atténuent

  • De toutes les grandes économies du monde, les États-Unis affichent l’impact le plus lent du resserrement de la politique monétaire, ce qui se traduit par une croissance relativement forte par rapport aux autres pays développés. Aux États-Unis, l’endettement des consommateurs est plus facile à gérer qu’il ne l’a été depuis des années, et les ménages qui ont des prêts hypothécaires à taux fixe à long terme n’ont pas ressenti la hausse des taux. Les entreprises ont réduit les échéances de leurs dettes. Les marchés du travail sont plus équilibrés en raison d’une diminution des postes vacants et d’un taux de chômage obstinément bas. Les travailleurs peu qualifiés réalisent de réels gains de revenu, tandis que les consommateurs à revenu élevé profitent de l’effet de richesse. À cause de ses effets décalés, la hausse antérieure des taux directeurs pèsera sur la croissance cette année, comme en témoignent l’utilisation accrue des cartes de crédit et la hausse des taux de défaillance.
  • Les dépenses des entreprises et la politique budgétaire devraient être soutenues par les dépenses projetées dans l’Inflation Reduction Act, l’Infrastructure Investment Act et la CHIPS Act. Toutefois, le déficit fédéral, qui représente actuellement 6,6 % du PIB, demeure un risque important. Les deux tiers des dépenses fédérales sont maintenant non discrétionnaires et en croissance en raison des tendances démographiques. Il est peu probable que les dépenses discrétionnaires se contractent, en particulier à l’approche des élections présidentielles américaines. Historiquement, les récessions au cours des années électorales (1960, 1980, 2008 et 2020) ont fait perdre le pouvoir au parti en place. Par conséquent, il sera important d’éviter une récession en cette période d’élection cruciale afin que les enjeux courants demeurent au centre de l’attention. Malgré des politiques budgétaires expansionnistes et le plein emploi, la Fed a fait part de son intention de ramener les taux à un niveau plus neutre. Ce « revirement », à savoir baisser les taux avant une hausse importante du chômage, favorise un atterrissage en douceur et vise à atteindre la cible d’inflation de 2 % sans ralentissement de la croissance. Néanmoins, nous attribuons une probabilité plus faible à ce scénario idéal que les marchés, qui semblaient très convaincus de ce scénario à la fin de l’année dernière.
  • Fait à souligner concernant l’inflation, l’indice annualisé des dépenses personnelles de consommation de base sur six mois a clôturé l’année dernière en baisse à environ 2 % en novembre, ce qui laisse entrevoir une trajectoire claire vers la cible de la Fed. Toutefois, si les politiques monétaire et budgétaire mettent en œuvre des mesures de relance l’an prochain, dans un contexte de croissance relativement stable, il est possible que la croissance augmente contre toute attente, ce qui pourrait ne pas correspondre à une désinflation soutenue. Selon nous, la possibilité d’une remontée de l’inflation est un risque prépondérant de marché sous-évalué, la politique expansionniste actuelle de la Fed augmentant la probabilité d’un faux pas semblable à celui d’Arthur Burns dans les années 1970.

Graphique 10 : Les mesures de l’inflation aux États-Unis laissent entrevoir une trajectoire vers la cible de la Fed

Sources : BEA, Macrobond.

 

Europe : une fragilité persistante

  • La croissance de l’Europe demeure difficile : le PIB de la zone euro a oscillé entre 0 % et 1 % en 2023 et ne s’améliore pas beaucoup en 2024. Dans un contexte de ralentissement de l’économie mondiale, l’Europe a été confrontée à des chocs d’offre négatifs l’an dernier, imputables à l’intensification de la concurrence mondiale dans le secteur manufacturier et aux ajustements continus de l’insécurité énergétique. Cette année, l’Europe fait également face à un choc négatif de la demande, les consommateurs et les entreprises s’ajustant aux taux d’intérêt plus élevés.
  • La politique budgétaire ne permet pas d’adopter d’importantes mesures de relance, même si les ministres des Finances de l’UE ont réussi à réformer l’union budgétaire à la fin de 2023. Ces réformes adhèrent au principe de limitation des déficits budgétaires, mais elles introduisent deux changements clés : premièrement, en permettant une marge d’écart selon la situation de chaque pays et, deuxièmement, en visant un retour à une cible de déficit de 3 % du PIB sur une plus longue période. En plus d’être des objectifs plus réalistes et réalisables, ils offrent une certaine souplesse aux pays pour soutenir la croissance.
  • Les salaires préoccupent toutes les banques centrales. En Allemagne, où le taux de chômage est de seulement 3 %, les coûts de la main-d’œuvre (rémunération horaire) augmentent d’environ 6 % sur 12 mois, soit le double du taux de chômage. L’inflation a considérablement diminué, terminant l’année à 2,9 % sur 12 mois, et les risques se répartissent de plus en plus également. Néanmoins, le ralentissement de l’économie et la croissance de la productivité devraient contribuer à contenir l’inflation à moyen terme. La Banque centrale européenne (BCE) a clôturé la dernière année en adoptant une position ferme quant à l’inflation. Au cours de la prochaine année, la capacité de la BCE à relever les taux pourrait être limitée par l’intention de la Fed de baisser les taux, car des hausses de taux décrétées par la BCE pourraient entraîner une appréciation non souhaitée de l’euro dans un contexte de concurrence internationale déjà difficile. Des baisses de taux décrétées par la BCE plus tard au cours de l’année à la suite d’un ralentissement de l’inflation tendant vers la cible devraient favoriser une reprise modérée.

Graphique 11 : La production industrielle stagne en Europe
Production industrielle réelle

Graphique linéaire illustrant la tendance à la hausse de la production industrielle en Allemagne, en Italie et en France dans les années 1990. La croissance de la production industrielle a stagné en Italie et en France en 2010, et a récemment été inférieure à la tendance en Allemagne.

Sources : Statistisches Bundesamt, iStat, INSEE, Macrobond.

 

Chine : des défis structurels persistants

  • Le rebond de la Chine en 2023 a été décevant, en raison principalement de la faiblesse des dépenses de consommation découlant de la déflation du secteur immobilier. Pour contrer le ralentissement de la croissance et la menace déflationniste, les autorités monétaire et budgétaire ont assoupli progressivement leur politique en réduisant les taux d’intérêt, en rajustant la réglementation concernant l’achat d’habitations et en augmentant de façon inhabituelle le déficit budgétaire. Ces mesures ont toutefois été progressives, car le gouvernement se méfie de l’aléa moral et refait face à la bulle immobilière. La construction résidentielle a considérablement ralenti. Compte tenu d’une économie à maturité, la croissance devrait encore ralentir par rapport au taux de 5,3 % de l’an dernier.
  • Le commerce international demeure un point positif, la Chine ayant délaissé les États-Unis au profit des marchés émergents. La Chine a également progressé dans la chaîne de valeur du secteur manufacturier en devenant le premier exportateur mondial de véhicules légers et un important producteur de machinerie lourde qui devrait profiter d’investissements dans l’énergie verte et le développement des infrastructures. Des risques de baisse subsistent, notamment en raison de l’aggravation de la situation démographique, car l’Inde devance maintenant la Chine pour ce qui est du pays le plus populeux du monde et du taux de chômage élevé des jeunes diplômés universitaires. La correction actuelle du marché immobilier n’a pas de solution à court terme, après une construction excessive et un recul de la confiance.
  • Contrairement à la plupart des pays du monde, la Chine ne s’est pas heurtée à des pressions déflationnistes : l’indice des prix à la consommation (IPC) a reculé de 0,5 % sur 12 mois en novembre et les prix à la production ont chuté de 3 % sur 12 mois. Par conséquent, les risques sont orientés vers des mesures de relance budgétaire et monétaire plus musclées. Les relations entre les États-Unis et la Chine sont passées à une dimension plus stratégique, qui entraînera vraisemblablement une diminution des échanges commerciaux et des investissements directs étrangers.

Graphique 12 : Les échanges commerciaux de la Chine avec les marchés émergents ont bondi par rapport à ceux avec les marchés développés
Valeur des exportations et des importations chinoises pour les principaux partenaires commerciaux sur une période mobile de 12 mois (indexée). Les marchés émergents sont le Brésil, la Russie, l’Inde et l’Afrique du Sud.

Sources : Administration générale des douanes chinoises, Macrobond.

Valorisations

VALORISATIONS : la croissance des bénéfices est cruciale en 2024

  • Les bénéfices des sociétés canadiennes ont atteint un sommet au début de 2023 et se sont détériorés tout au long de l’année, se contractant d’environ 5 % en raison de l’essoufflement de l’économie et de la hausse soutenue des coûts des intrants. En revanche, les bénéfices des sociétés américaines sont demeurés stables. La vigueur de la consommation aux États-Unis, soutenue par l’épargne excédentaire accumulée pendant la pandémie et la vigueur du marché de l’emploi, a contribué à la résilience de la croissance économique.
  • Nous prévoyons une croissance modeste des bénéfices des sociétés en 2024. Le ralentissement du PIB nominal des États-Unis et la contraction probable du PIB nominal du Canada demeurent des facteurs défavorables sur le plan des revenus, mais nous nous attendons à ce que tout ralentissement ou récession soit relativement léger. Les facteurs favorables à long terme devraient compenser les faiblesses cycliques et l’efficacité opérationnelle devrait, à son tour, stimuler la croissance des bénéfices. Cela dit, nous prévoyons une forte croissance des bénéfices à court terme et une reprise probable dans la seconde moitié de 2024.
  • Les marges bénéficiaires se sont contractées jusqu’en 2023, mais se sont stabilisées au deuxième semestre, conformément à nos prévisions. En 2024, nous prévoyons une légère augmentation des marges bénéficiaires aux États-Unis et au Canada. Les sociétés font des gains d’efficacité opérationnelle, notamment par la gestion améliorée des stocks et de la chaîne d’approvisionnement, afin de compenser les coûts de la main-d’œuvre et d’autres intrants. Nous prévoyons également que les coûts des intrants seront moins élevés en 2024, parce que les marchés de l’emploi sont plus équilibrés et que la pression sur les salaires s’atténue.
  • Aux États-Unis, nous prévoyons une hausse de 7 % du bénéfice par action (BPA) pour les sociétés de l’indice S&P 500 en 2024. Le ralentissement économique au Canada est déjà plus prononcé et nous prévoyons une croissance des bénéfices de 4 % pour les sociétés de l’indice S&P/TSX. Nos prévisions de BPA pour 2024 sont de 235 $ l’action aux États-Unis et de 1 475 $ l’action au Canada, soit moins que les prévisions consensuelles de 245 $ US et de 1 518 $ CA, respectivement.
  • La croissance des bénéfices de l’indice MSCI Monde tous pays devrait se situer quelque part entre celle du Canada et celle des États-Unis. À l’échelle mondiale, la plus forte croissance des bénéfices devrait provenir des États-Unis (voir ci-dessus) et des marchés émergents, en particulier de l’Inde, en raison de l’augmentation des dépenses en immobilisations et des exportations. Cette croissance devrait plus que compenser les faiblesses de la Chine, qui continue de faire face à des difficultés à long terme.

Graphique 13 : La croissance des bénéfices devrait s’accélérer en 2024
Croissance des bénéfices

Graphique linéaire comparant la variation sur 12 mois de la croissance des bénéfices de l’indice S&P 500 et de l’indice composé S&P/TSX de 2013 à 2024.

Sources : I/B/E/S, Valeurs Mobilières TD, Macrobond.

 

VALORISATIONS : les ratios resteront près de leurs niveaux actuels

  • Les ratios de valorisation ont augmenté en 2023, en particulier vers la fin de l’année, en raison du ralentissement de l’inflation et de l’activité économique, ainsi que du changement d’orientation conciliant de la Fed qui a fait baisser les taux obligataires. Cette situation a suscité l’optimisme quant à un atterrissage en douceur de l’économie, ce qui a soutenu les ratios de valorisation. En 2024, les ratios cours/bénéfice (C/B) au Canada et aux États-Unis devraient rester globalement inchangés, à environ 14 fois et 21 fois respectivement, pour les 12 derniers mois. Les risques semblent assez équilibrés. Nos prévisions pour l’indice de fin d’année s’établissent à 4 975 pour l’indice S&P 500 et à 22 000 pour l’indice S&P/TSX, en raison de la croissance des bénéfices plutôt que de l’expansion des ratios. Ces prévisions sont inférieures aux projections actuelles du marché et laissent entrevoir des rendements de l’ordre de 5 % à 10 % aux États-Unis et au Canada par rapport aux niveaux de fin d’année, l’indice S&P/TSX enregistrant un rendement légèrement supérieur en raison de son retard dans la récente remontée.
  • Les valorisations boursières ont aussi augmenté à l’échelle mondiale. Les ratios C/B des régions à l’extérieur des États-Unis, comme l’EAEO et les marchés émergents, ont augmenté, mais ils demeurent inférieurs aux moyennes historiques. Nous prévoyons que l’expansion des ratios sera modeste en 2024 pour les marchés boursiers mondiaux. Quoi qu’il en soit, nous nous attendons à des rendements positifs pour les actions mondiales, et nous prévoyons que les actions des marchés émergents enregistreront des rendements supérieurs à ceux des autres régions du monde, probablement dans la seconde moitié de l’année.

Graphique 14 : Augmentation limitée des ratios

Graphique linéaire illustrant les ratios C/B de l’indice S&P 500 et de l’indice composé S&P/TSX de 2000 à 2023.

Sources : I/B/E/S, Valeurs Mobilières TD, Macrobond.

 

VALORISATIONS : les obligations sont évaluées à leur juste valeur

  • Les perspectives pour les obligations sont plus équilibrées. Les taux réels sont positifs comparativement aux attentes d’une inflation contenue et les banques centrales devraient abaisser les taux nominaux pour maintenir des taux réels plus neutres. Les baisses de taux d’intérêt au premier semestre de l’année devraient soutenir les rendements obligataires à court terme, même si ces baisses sont déjà prises en compte dans les taux de rendement actuels. Les autorités monétaires semblent avoir terminé leur cycle de relèvement des taux d’intérêt. Par conséquent, le risque de rendements obligataires négatifs prononcés découlant de nouvelles hausses des taux d’intérêt est minime par rapport à 2022 et aux trois premiers trimestres de 2023. De plus, les investisseurs obligataires profiteront de taux de rendement de départ plus élevés.
  • Le taux des obligations canadiennes à 10 ans a reculé de 0,21 % en 2023 pour s’établir à 3,12 % grâce à une remontée des obligations en fin d’année. Nous continuons de croire que les forces structurelles devraient maintenir les taux obligataires à des niveaux élevés par rapport à la période qui a suivi la crise financière mondiale. Toutefois, comme nous prévoyons une légère récession au Canada en 2024, nous croyons que les taux obligataires pourraient diminuer, surtout dans le cas des échéances à court terme, et que les possibilités de baisse pour les échéances à moyen et à long terme sont moins importantes. Les taux à long terme reflètent déjà des valorisations comparables à celles d’une récession. De plus, les facteurs techniques au Canada, dont la forte demande des régimes de retraite et l’offre insuffisante d’obligations à 30 ans, continuent de peser sur les taux à long terme. Toutefois, certains de ces facteurs pourraient se dissiper à mesure que les régimes de retraite approchent de leur répartition cible et que les taux obligataires à long terme deviennent moins intéressants. Cette situation pourrait exercer des pressions à la hausse sur les taux à long terme en 2024. Pour l’année, nous nous attendons à ce que le taux des obligations du gouvernement du Canada à 10 ans se situe dans une fourchette de 2,75 % à 4 %, le taux de départ de 2024 se situant déjà dans la partie inférieure de cette fourchette.
  • L’indice obligataire universel FTSE Canada a progressé de 6,7 % en 2023, évitant de justesse une troisième année consécutive de rendements négatifs, jamais vue auparavant, grâce à un solide rebond au quatrième trimestre. Nous sommes optimistes pour les obligations en 2024, car nous nous attendons à ce que les faibles pressions à la hausse sur les taux à long terme soient compensées par les pressions à la baisse sur les taux à court terme. Les écarts de taux pourraient s’élargir en cas de ralentissement plus prononcé, mais, étant donné que nous prévoyons une légère récession au Canada, les écarts de taux devraient se resserrer après l’élargissement initial. Nous prévoyons un rendement de 3 % à 6 % pour l’indice obligataire universel FTSE Canada en 2024, comparativement à un taux de rendement courant de 3,94 %.

Graphique 15 : Après de solides gains l’an dernier, les rendements devraient encore être positifs en 2024

Sources : TSX, FTSE Global Debt Capital Market Inc., S&P Global, MSCI.

Stratégie et composition de portefeuille

La remontée des catégories d’actif à la fin de 2023 a procuré de solides rendements aux investisseurs après une année 2022 décevante. Bien qu’une grande partie du rendement de l’indice S&P 500 en 2023 ait été attribuable aux actions des sept géants, l’élargissement de la reprise à tous les secteurs GICS a marqué un changement d’humeur important. D’ici la fin de 2023, l’humeur des investisseurs, un indicateur à contre-courant à des niveaux extrêmes, est passée du pessimisme au neutre, et a maintenant atteint son niveau le plus optimiste depuis avril 2021. Cette amélioration a coïncidé avec la hausse des marchés boursiers et obligataires. Toutefois, cette situation favorise maintenant le risque de baisse, surtout si l’atterrissage en douceur ne se concrétise pas. À l’heure actuelle, les cours boursiers tiennent maintenant compte d’un scénario parfait. Il faut valider les fortes baisses de taux déjà prises en compte dans les marchés obligataires, la poursuite d’une croissance supérieure à la tendance et l’atténuation de l’inflation, une combinaison qui semble improbable.

Le virage de la Fed vers une politique plus expansionniste ne fait que soutenir l’approche d’un atterrissage en douceur pour l’instant, même si elle pourrait être considérée éventuellement comme une erreur de politique. Quoi qu’il en soit, il pourrait y avoir des baisses sur les marchés boursiers si l’économie ralentit plus que prévu ou si la décélération de l’inflation stagne. Les valorisations, en particulier aux États-Unis, sont devenues de plus en plus chères, même si la baisse des taux d’intérêt aide à justifier ces niveaux. Les valorisations canadiennes sont moins élevées, ce qui reflète la composition différente du marché et les craintes d’une détérioration des perspectives. Par conséquent, nous prévoyons que les gains boursiers seront principalement attribuables à la croissance des bénéfices plutôt qu’à l’expansion des ratios.

La croissance des revenus pourrait être mise à mal si le PIB nominal ralentit considérablement ou se contracte. De plus, compte tenu de la solide performance de décembre et de l’optimisme actuel, il pourrait y avoir un risque de baisse à court terme pour les rendements boursiers. Quoi qu’il en soit, nous croyons que les marchés boursiers produiront des rendements positifs dans l’ensemble pour l’année.

Sur le plan géographique, nous prévoyons des rendements boursiers positifs dans les marchés développés et émergents, les marchés émergents et le Canada affichant probablement les meilleurs rendements dans l’ensemble, malgré une faiblesse potentielle à court terme. Les marchés émergents devraient profiter de la dépréciation du dollar américain lorsque la Fed commencera à abaisser les taux d’intérêt. Cela aura pour effet de soutenir l’activité économique dans la région, car la vigueur du dollar américain a une incidence négative sur le volume des échanges commerciaux et sur un certain nombre de paramètres financiers, dont la disponibilité du crédit et les entrées de capitaux. Les actions canadiennes devraient profiter d’une reprise des bénéfices après une légère récession, et le risque de contraction des ratios devrait être moins élevé que celui des actions américaines compte tenu des valorisations de départ plus intéressantes.

Les actions à petite capitalisation, plus sensibles aux cycles économiques et affichant souvent des bénéfices plus volatils que les actions à grande capitalisation, justifient une approche prudente à l’aube de 2024, compte tenu du risque persistant d’un repli, en particulier au Canada. Malgré le changement de cap de la Fed, nous croyons que les risques associés aux actions à petite capitalisation – baisse des perspectives de rentabilité et accroissement de la volatilité – l’emportent toujours sur les rendements potentiels. Nous ne prévoyons pas une expansion généralisée des ratios des actions à petite capitalisation, mais nous demeurons ouverts à une augmentation de nos placements si des signes d’une reprise généralisée de la croissance mondiale émergent.

Les valorisations du marché obligataire au Canada demeurent généralement favorables, même si la forte baisse des taux obligataires à la fin de 2023 laisse entrevoir des conditions de surachat. Quoi qu’il en soit, comme les taux obligataires se situent à des niveaux intéressants et que les banques centrales devraient commencer à abaisser les taux d’intérêt en 2024, les obligations présentent un profil risque-rendement intéressant.

Répartition de l’actif

  • Malgré des prévisions de rendements positifs pour les obligations et les actions, nous avons commencé l’année avec une position défensive. La répartition de l’actif des portefeuilles équilibrés favorise actuellement les liquidités en raison de l’amélioration des taux de rendement, en partie attribuable à l’inversion des courbes de taux. Les actions et les obligations sont sous-pondérées par rapport aux niveaux cibles de l’indice de référence, la sous-pondération des obligations étant moins importante que celle des actions. Du côté des actions, nous préférons les actions canadiennes aux actions mondiales.
  • Comme les marchés boursiers et obligataires prennent en compte d’importantes baisses des taux d’intérêt, nous devrions nous attendre à un certain renversement de la reprise de fin d’année 2023 à court terme. Une réévaluation du scénario d’un atterrissage en douceur par les marchés boursiers pourrait entraîner un délestage qui représenterait une occasion intéressante de revenir aux actions, en particulier aux actions canadiennes, aux actions à petite capitalisation et aux actions des marchés émergents.

Graphique 16 : L’humeur est devenue extrêmement positive

Graphique linéaire montrant une mesure de l’humeur des marchés boursiers de 2020 à 2023 qui affiche un sommet à la fin de 2023, ce qui laisse entrevoir de l’optimisme.

Sources : AAII, Macrobond.

 

Sélection des titres et des secteurs

  • Dans l’ensemble, les marchés boursiers semblent chers, mais certains segments ont déjà pris en compte un repli, et nous ajoutons des titres de sociétés cycliques dont les valorisations sont favorables.
  • Nous privilégions également les sociétés capables de générer une croissance des bénéfices dans un contexte de baisse des revenus. Ces sociétés devraient être en mesure de profiter de la croissance de leur chiffre d’affaires en raison des tendances à long terme et de surmonter certaines difficultés cycliques. Il peut s’agit de sociétés qui profitent de la décarbonisation, de la réorganisation de la chaîne d’approvisionnement, des dépenses en immobilisations et de la construction, ainsi que de sociétés qui intègrent l’IA ou y sont exposées.
  • Les sociétés affichant des flux de trésorerie disponibles stables et durables sont également favorisées. Ces sociétés peuvent stimuler la croissance des bénéfices au moyen de rachats d’actions et d’activités de fusions et d’acquisitions relutives (lorsque le bénéfice d’une société acquéreuse augmente à la suite d’une transaction).

Obligations de sociétés

  • À l’instar des marchés boursiers, les obligations de sociétés se sont bien comportées jusqu’à la fin de 2023. Les taux obligataires ont augmenté au cours des dernières années et, malgré le resserrement des écarts de taux en 2023, le rendement global demeure intéressant pour les investisseurs. La demande pour les titres de créance de catégorie investissement et les titres à rendement élevé est forte, parce qu’ils offrent des rendements intéressants comparativement aux primes de risque minimes des actions qui montrent que le ratio des bénéfices par rapport aux taux des obligations du Trésor à 10 ans avoisine son plus bas niveau des dernières décennies.
  • Les écarts de taux des obligations de sociétés, qui se situent à environ 155 points de base (pb) au-dessus de ceux des obligations souveraines après un resserrement à la fin de l’année, avoisinent leur moyenne sur 15 ans. Ces écarts de taux sont exceptionnellement serrés pendant une période de faiblesse attendue associée à un ralentissement de l’économie et des bénéfices au Canada. Ces écarts de taux sont loin des niveaux observés lors des trois dernières récessions où ils ont généralement dépassé 200 pb. Compte tenu de l’incidence de la reprise de fin d’année sur les valorisations, une nouvelle compression des écarts de taux semble relativement limitée pour l’instant.
  • Les écarts de taux se situent actuellement au milieu des fourchettes historiques. Nous estimons qu’il est très avantageux de détenir des obligations de sociétés dans des secteurs où le taux de rendement est favorable, tout en ajustant l’exposition globale aux titres de créance en conséquence, compte tenu du potentiel limité d’un resserrement important des écarts de taux.

Graphique 17 : Le resserrement récent des écarts de taux laisse peu de place à une nouvelle compression.

Remarque : Écart moyen des obligations de sociétés dans l’indice des obligations universelles FTSE.
Sources : FTSE Global Debt Capital Markets Inc. et Gestion de placements Connor, Clark & Lunn Ltée.

Durée et courbe des taux

  • Au quatrième trimestre de l’an dernier, les taux obligataires ont chuté aux États-Unis et au Canada, effaçant ainsi les gains du trimestre précédent. En ce début d’année 2024, les attentes de ralentissement et, par conséquent, de rendement supérieur des obligations sont bien connues. Néanmoins, le point de départ semble défavorable après la baisse des taux en fin d’année. L’adoption d’une stratégie de durée plus longue que l’indice de référence dépend maintenant d’une récession plus prononcée, étant donné que les marchés prennent en compte cinq baisses de taux d’intérêt au Canada à partir du printemps. Il s’agit d’une décision audacieuse, malgré notre point de vue austère de la croissance au Canada. De plus, le marché semble tout à fait optimiste devant l’éventualité d’une réaccélération de l’inflation ou même d’un rebond de la croissance – chacun de ces facteurs devrait faire augmenter les taux de rendement à long terme. Pour cette raison, nous commençons l’année avec une durée plus courte que celle de l’indice de référence.
  • Notre plus grande conviction réside dans la dynamique de la courbe des taux. Les taux à court terme ont été supérieurs à ce que la plupart des prévisionnistes attendaient l’an dernier, et les achats actifs de régimes de retraite, conjugués aux craintes d’une récession, ont fait baisser les taux de rendement à long terme. La courbe des taux a donc atteint son niveau le plus inversé depuis le début des années 1990 (environ -125 pb entre les taux des obligations du gouvernement du Canada à 2 ans et à 10 ans), qui est resté inchangé pendant la majeure partie de l’année, contrairement au reste du monde où les courbes des taux se sont moins inversées. En période de récession, la normalisation de la courbe menée par les taux à court terme est probable, tandis que le segment à long terme peut subir des pressions à la hausse en raison de facteurs techniques ou inflationnistes potentiels, comme l’augmentation de l’offre d’obligations mondiales et la poursuite d’un programme d’assouplissement quantitatif, en particulier aux États-Unis. Selon nous, même dans un scénario de récession, les taux à long terme au Canada ont peu de marge de manœuvre pour se redresser en raison des attentes du marché et des facteurs techniques qui ont pesé sur les taux à long terme. Par conséquent, nous prévoyons une normalisation de la courbe des taux selon divers scénarios en 2024.
  • Les obligations à rendement réel offrent également un profil risque-rendement intéressant, car le marché tient largement compte du risque de réaccélération de l’inflation.

Graphique 18 : Les taux à 10 ans se sont repliés très rapidement

Source : Macrobond.

 

Graphique 19 : La courbe des taux devrait se normaliser

Source : Macrobond.

Sommaire

  • Nous croyons que l’actualité politique et l’incertitude domineront une grande partie des débats cette année et atténueront l’incidence d’un modeste ralentissement cyclique. Ces dernières années ont été marquées par la fin de la stagnation à long terme, car les gouvernements ont redécouvert le pouvoir de la politique budgétaire, un facteur ayant joué un rôle important dans l’inflation. Nous prévoyons que les investissements publics et privés se poursuivront afin de renforcer les chaînes d’approvisionnement, de lutter contre les menaces à la cybersécurité, de fortifier les sources d’énergie et les activités commerciales pour faire face aux changements climatiques, et d’attirer et de retenir des travailleurs au moyen de changements démographiques. De plus, l’émergence et les répercussions de l’IA ont ajouté un potentiel d’investissement supplémentaire pour tirer parti des gains de productivité. Ces thèmes façonnent nos perspectives pour 2024. Nous prévoyons que les banques centrales délaisseront la lutte contre l’inflation pour adopter une approche plus équilibrée, compte tenu des dommages causés par les hausses de taux. Tous ces facteurs poseront des défis à court terme pour les marges et les bénéfices des sociétés et présenteront des occasions plus tard, car les valorisations deviennent attrayantes. Nos perspectives sont généralement favorables et nous ajusterons le positionnement du portefeuille pour tirer parti des occasions dans un contexte de volatilité attendue.

Winter sunset overlooking the city of Vancouver. Cypress Mountain Provincial Park, North Vancouver, British Columbia, Canada.

Il y a un an, dans nos Perspectives de décembre 2022, nous présentions les avantages d’investir au Canada. Tout en reconnaissant que, comme dans de nombreux autres pays, les Canadiens se sont endettés pour devenir propriétaires au cours de la décennie de faibles taux d’intérêt qui a précédé la pandémie, les perspectives à long terme du pays reflétaient de nombreux facteurs positifs. Nous estimions que les marchés d’actifs canadiens étaient bien placés pour profiter de ces facteurs positifs. L’une des principales raisons a été la restructuration de la pyramide démographique du Canada avec un afflux important de nouveaux immigrants.

Au cours de la dernière année, le resserrement de la politique monétaire a produit l’effet escompté, et le PIB réel du Canada devrait croître modestement, soit de 1,2 % en 2023, selon la Banque du Canada. L’activité économique s’essouffle, en effet, en raison de la baisse des dépenses de consommation et des investissements des entreprises, qui souffrent tous deux de la hausse des taux d’intérêt. En revanche, la population canadienne devrait croître de près de 3 % en 2023, soit le taux d’immigration le plus élevé depuis des décennies (graphique 1). Au total, la population augmentera de plus d’un million de personnes; les naissances nettes représentent environ 5 % de la hausse, l’immigration, 40 %, et les résidents non permanents, le reste. Compte tenu de ces facteurs, non seulement le PIB par habitant n’est pas revenu à sa tendance à long terme dans le cadre de l’expansion post‑pandémique, mais il est en train de chuter et de creuser un écart important par rapport à notre potentiel (graphique 2). Il vaut la peine d’examiner l’incidence démesurée de la croissance de la population sur le Canada, et en particulier les différentes façons dont elle a faussé les données.

Graphique 1 : Hausse de la population ces dernières années

Le graphique 1 montre la croissance de la population canadienne, par groupes d’immigrants et de résidents temporaires, de 1980 à 2022. La croissance de la population a augmenté de façon notable depuis 2016, avec une hausse particulièrement importante en 2022 attribuable aux résidents temporaires.

Sources : Statistique Canada et Macrobond.

Graphique 2 : Même si le PIB se maintient, l’activité par habitant diminue

Le graphique 2 montre le PIB canadien par habitant par rapport à sa tendance, à partir de 1980. Le PIB par habitant a crû conformément à la tendance de 2010 à 2020, puis a baissé pendant la pandémie. Même si le PIB par habitant a rebondi après la pandémie, il est resté inférieur à la tendance et, plus récemment, il a diminué.

Sources : Statistique Canada et Macrobond.

 

Les données dans le contexte de la croissance de la population

De nombreuses raisons expliquent le niveau élevé de l’inflation au cours des dernières années, les prix des services ayant subi d’importantes pressions récemment en raison de la hausse des salaires. Le taux des postes vacants à l’échelle du pays a plus que doublé pour atteindre 6 % au cours de la dernière année, comparativement à la période pré-pandémique, et l’afflux de nouveaux travailleurs a été une source de main-d’œuvre bien appréciée. À l’heure actuelle, le marché de l’emploi continue de produire des gains remarquablement stables, environ 20 mois après le début d’un cycle de hausse de taux historiquement rapide. En novembre, 25 000 emplois nets ont été créés, un solide gain qui est supérieur à la moyenne historique à long terme et une tendance qui se poursuit, soit des gains mensuels moyens de 39 100 emplois depuis le début de l’année. En revanche, la croissance de la population canadienne présente un portrait différent et moins favorable, car l’économie doit créer 56 000 emplois nets chaque mois, conformément à la croissance de la population active, simplement pour empêcher une hausse du taux de chômage (graphique 3). Bien que les données donnent à penser que le marché de l’emploi demeure serré dans des conditions normales, la récente hausse de la population laisse entrevoir, au mieux, un marché de l’emploi équilibré aujourd’hui. En effet, les postes sont maintenant pourvus et le taux de postes vacants est en baisse de 2 points de pourcentage par rapport au sommet de 2022, et s’établissait à seulement 3,6 % le mois dernier, soit la limite supérieure de la fourchette pré‑pandémique.

Graphique 3 : Le nombre de personnes qui intègrent la population active est supérieur au nombre de personnes qui se trouvent un emploi

Le graphique 3 montre la variation sur 12 mois de l’emploi au Canada, par rapport à la variation de la population active canadienne. Au cours de l’histoire du graphique, qui commence en 2014, la croissance de l’emploi au Canada a été conforme ou supérieure à la croissance de la population active, à l’exception de la période de rebond après la pandémie. En 2023, la croissance de la population active a dépassé la croissance de l’emploi.

Remarque : L’axe Y exclut la période de volatilité pendant la pandémie.
Sources : Statistique Canada et Macrobond.

Dans l’ensemble des marchés de l’habitation, il est bien connu que le Canada est aux prises avec un problème d’abordabilité, car les prix des logements par rapport aux revenus sont les plus élevés à l’échelle mondiale, tandis que la valeur domiciliaire représente une part exceptionnellement importante de la valeur nette des ménages au pays. Plusieurs attribuent ce problème à la faible offre de logements. Toutefois, l’activité de construction a bondi au cours des dernières années, les mises en chantier s’établissant en moyenne à 267 000 au cours des trois dernières années, soit 40 % de plus que la moyenne à long terme (ce qui est déjà un exploit compte tenu de la pénurie de métiers spécialisés dans le secteur). Malgré tout, la nouvelle offre n’a pas suffisamment augmenté pour répondre à la nouvelle demande et n’a pas fait grand-chose pour atténuer le problème d’abordabilité. Cela est particulièrement vrai, alors que les nouveaux résidents ne font que s’ajouter à la cohorte de milléniaux qui atteigne l’âge où la majorité des ménages sont formés, soit 32 ans. Ce déséquilibre a fait en sorte que les villes ont dû tenter, de façon fragmentaire, de créer de l’offre dans la mesure du possible et de mettre en place des politiques de logement plus solides. Par conséquent, ce secteur qui est habituellement le plus sensible aux taux d’intérêt pourrait être très peu touché durant le ralentissement prévu.

Comme nous l’avons mentionné plus haut, seulement environ la moitié des nouveaux arrivants sont des immigrants permanents. Il peut être important de comprendre cette différence, étant donné que les résidents non permanents, qui sont des étudiants ou des titulaires d’un visa de travail temporaire, peuvent accroître la volatilité des données. En effet, ce groupe pourrait présenter des caractéristiques procycliques en ce qui a trait à l’économie. Par exemple, si le marché de l’emploi devait fléchir, les travailleurs de tous les types perdraient leur emploi, ce qui inciterait bon nombre d’entre eux qui ont un visa de travail temporaire à chercher du travail ailleurs ou à retourner chez eux. De plus, les demandes des étudiants internationaux sont déjà en baisse et les visas pourraient ralentir davantage, car la surveillance gouvernementale attendue depuis longtemps entraînera des sanctions contre les établissements d’enseignement plus douteux et les fraudes. En termes simples, une économie vigoureuse attirera de nouveaux venus, mais une récession pourrait être exacerbée si certains de ces nouveaux résidents moins permanents choisissent de partir.

Comme nous l’avons mentionné plus haut et comme nous en avons discuté l’an dernier, nous demeurons optimistes à l’égard du Canada pour de nombreuses raisons. L’une d’entre elles, qui n’est pas une priorité, mais qui, selon nous, deviendra de plus en plus importante, est que la croissance de la population modifiera considérablement la demande de services au-delà du logement. Les gouvernements pourraient être forcés de renouveler leurs dépenses dans les services, les bâtiments et les infrastructures, y compris les hôpitaux, les écoles, les routes et les aéroports, ce qui accroîtra les autres investissements des entreprises au cours des prochaines années. En effet, l’un de nos thèmes à long terme depuis longtemps est l’importance des dépenses en immobilisations qui, selon nous, découleront de l’intégration de l’intelligence artificielle, de la transformation de l’énergie verte et de la reconstruction de la chaîne d’approvisionnement mondiale. Tout cela pourrait grandement contribuer à renverser une période de productivité lamentable.

Marchés financiers

Plus récemment, les marchés financiers ont fait bonne figure. Le mois de novembre a été exceptionnel pour l’ensemble des actifs des marchés publics. Après trois mois consécutifs de rendements négatifs des actions canadiennes, l’indice composé S&P/TSX a progressé de 7,5 % en novembre. Ce gain mensuel n’a été dépassé que cinq fois depuis la crise financière mondiale. Ce mois-ci, chacun des onze secteurs a inscrit un rendement positif, notamment les technologies de l’information avec un gain massif de 27,4 %. Ce solide gain a été observé tant pour les actions à grande capitalisation que pour celles à petite capitalisation, les premières ayant surpassé les secondes, et les secteurs cycliques du marché ayant mieux fait que les secteurs plus défensifs. Bien que les gains enregistrés par les marchés boursiers en novembre aient été généralisés, l’ampleur du marché a été assez inégale tout au long de l’année. Aux États-Unis, il y a rarement eu une année où les solides rendements ont été générés par si peu de titres individuels. L’indice S&P 500, pondéré en fonction de la capitalisation boursière, a bondi de 20,8 % depuis le début de l’année, en raison principalement de la domination restreinte des titres technologiques à mégacapitalisation; par ailleurs, l’indice équipondéré S&P 500 n’a progressé que de 8,1 %. Les prix des produits de base ont été contrastés. Notamment, les prix du pétrole se sont repliés, le WTI ayant reculé de 5,1 % par rapport au mois précédent, pour s’établir à 75 $ US le baril, avant de reculer davantage au début de décembre. Par ailleurs, les prix des métaux précieux ont atteint un sommet inégalé depuis six mois, en hausse de 2,6 % au cours du mois. L’or a atteint un sommet record vers la fin du mois, le dollar américain ayant finalement perdu de sa vigueur. Après avoir bondi par rapport aux creux de juillet, le dollar s’est largement déprécié en novembre.

Ce changement d’humeur a été provoqué au début du mois par la réunion du FOMC et a pris de l’ampleur en raison de la baisse de l’IPC aux États-Unis et de la révision à la hausse du PIB du troisième trimestre, qui a atteint un rythme annualisé impressionnant de 5,2 % par rapport au trimestre précédent, plus d’un an et demi après le début des hausses de taux. C’est ce qui a amené le marché à anticiper résolument un atterrissage en douceur. Par conséquent, les taux d’intérêt ont commencé à refléter la probabilité que le cycle de hausse de taux des banques centrales ait atteint un sommet et qu’un ralentissement soit imminent. Au Canada, les taux des obligations à 2 ans et à 10 ans ont chuté d’environ 0,5 %, tandis que les écarts de taux se sont considérablement resserrés, malgré une augmentation des émissions. Ensemble, ces facteurs ont fait grimper l’indice des obligations universelles FTSE Canada de 4,29 % en novembre et l’indice des obligations à long terme, de 8,54 %, ce qui est exceptionnel. Ce dernier a enregistré le rendement mensuel le plus élevé depuis 1982. De même, l’indice général des obligations américaines a inscrit un rendement de 4,53 %, son meilleur rendement mensuel depuis mai 1985. Les rendements positifs enregistrés par les marchés des titres à revenu fixe et des actions ont permis aux portefeuilles équilibrés 60/40 traditionnels d’inscrire les meilleurs rendements mensuels depuis novembre 2020, lorsque les marchés ont absorbé les bonnes nouvelles concernant le vaccin contre la COVID-19. Malgré toutes ces bonnes nouvelles, un message à retenir est que nous croyons que les marchés demeurent dans un état d’incertitude et de volatilité accrues.

Stratégie de portefeuille

En effet, l’évolution du marché demeure constante et rapide. Les actifs risqués n’ont pas accueilli favorablement la hausse des taux d’intérêt pendant l’été et l’automne, et les marchés obligataires ont fait grimper les taux plus que ce qui était justifié. Lorsqu’un sommet des taux à court terme semblait tout proche, les taux d’intérêt ont dégringolé tout aussi fortement, entraînant une remontée de fin d’année de l’ensemble des marchés publics. À partir de maintenant, les risques semblent orientés à la baisse. Par conséquent, nos portefeuilles équilibrés continuent de sous-pondérer les actions et de détenir des liquidités, car nous prévoyons que les bénéfices subiront des pressions en raison du ralentissement de l’économie. Les portefeuilles d’actions fondamentales canadiennes investissent de façon sélective dans des sociétés dont les valorisations sont favorables, tout en conservant une préférence pour les titres de grande qualité. Les portefeuilles de titres à revenu fixe se positionnent de plus en plus en vue d’une normalisation de la courbe des taux, et demeurent prudents à l’égard des titres de créance.

L’orientation du marché dépend en grande partie de la capacité des décideurs et de l’économie à atteindre l’atterrissage en douceur que les marchés ont maintenant pris en compte. Pour ce faire, les marchés de l’emploi devront trouver un équilibre. C’est vrai tant pour la nécessité de limiter les gains salariaux et les répercussions sur les prix des services dans l’IPC, que pour la capacité des gens à conserver leur emploi et à continuer de dépenser. Pour bien évaluer le statu quo économique au Canada, il faut reconnaître que la croissance de la population a eu une influence démesurée. L’évolution du profil démographique du pays modifiera la dynamique à court terme de la demande de main-d’œuvre et de logements. Les données seront plus favorables en termes absolus, mais à bien des égards, elles seront moins optimistes compte tenu du choc démographique positif. Cet afflux a été bénéfique du point de vue de l’offre de main-d’œuvre et, surtout, pour le développement futur des infrastructures. Nous sommes optimistes à l’égard des perspectives à long terme de l’économie, mais nous prévoyons une période cyclique plus agitée au cours des prochains trimestres. Nous approfondirons cette question dans nos Prévisions pour l’année à venir qui seront publiées en janvier. De la part de toute l’équipe de « CCL », nous vous remercions de votre soutien et vous souhaitons de joyeuses Fêtes et une nouvelle année prospère.

Arbres d'automne au centre-ville de Vancouver, Canada.

Les marchés s’attendent depuis longtemps à un ralentissement économique et, au-delà de celui-ci, à une baisse potentielle des taux d’intérêt, alors que les banques centrales interviennent pour soutenir l’économie. L’inversion de la courbe des taux au cours de la dernière année et demie a été un indicateur clé. Au cours des derniers mois, la Réserve fédérale américaine, la Banque du Canada et d’autres grandes banques centrales semblent avoir atteint le sommet de leur cycle de hausses de taux. Le cycle économique tire à sa fin et les banques centrales ont cessé de relever les taux, mais n’ont pas encore assoupli leur politique. Au cours des 40 dernières années, cette période de transition s’est allongée, car les banques centrales n’ont généralement pas procédé à des relèvements excessifs, qui nécessiteraient un revirement immédiat et marqué vers un cycle d’assouplissement. Avant 1985, la période médiane entre la dernière hausse de taux et la première baisse de taux était d’environ deux mois, mais elle s’est prolongée jusqu’à huit mois après 1985 (voir le graphique 1). Par conséquent, dans les cycles économiques des dernières décennies, il est arrivé que les marchés, en absorbant de nouvelles données, anticipent un atterrissage en douceur. Toutefois, les premiers signes de ralentissement peuvent également annoncer un repli plus prononcé.

Graphique 1 : Décalages plus longs entre les changements de politique

Le graphique 1 montre le taux cible de la Réserve fédérale pour la période allant de 1971 à 2023, ainsi que le nombre de mois entre le dernier resserrement et le premier assouplissement au cours de la période. Les données révèlent qu’avant 1990, il y avait une courte période entre la dernière hausse des taux d’intérêt et la première réduction. Depuis 1990, la période entre la dernière hausse des taux d’intérêt et la première réduction a augmenté.

Sources : Réserve fédérale, Minack Advisors et Macrobond

Si une inversion de la courbe des taux signale un ralentissement économique, sa normalisation coïncide souvent avec ce ralentissement. À mesure que la courbe des taux passe de l’inversion à l’aplatissement, puis revient à la normale (où les taux obligataires à long terme sont plus élevés que ceux à court terme), le chômage a tendance à augmenter, l’activité économique recule et l’inflation diminue. En particulier, la courbe des taux des obligations du Trésor américain de 2 à 10 ans est passée de -93 points de base (pb) en juillet à seulement -20 pb à la fin d’octobre (voir le graphique 2).

Graphique 2 : La normalisation est un signe avant-coureur d’une récession

Le graphique 2 montre la courbe des taux aux États-Unis, mesurée par le taux des obligations à 10 ans moins le taux des obligations à 2 ans, par rapport aux récessions aux États-Unis. Dans le passé, la courbe des taux se normalise juste avant une récession. La courbe des taux a évolué de façon similaire au cours de la plus récente période.

Remarque : Les zones ombrées correspondent aux récessions aux États-Unis.
Sources : Département du Trésor américain et Macrobond

Les actions perdent du terrain dans le cadre d’un ralentissement, mais se comportent mieux lors d’un atterrissage en douceur. Toutefois, même si, dans le cycle actuel, nous nous retrouvons dans un scénario d’atterrissage en douceur, la vigueur des actions est incertaine en raison du niveau d’optimisme considérable déjà pris en compte par le marché. Les prévisions de bénéfices, surtout aux États-Unis, semblent exagérément optimistes. Par exemple, on prévoit que les bénéfices de 2024 augmenteront de 12,5 % par rapport à cette année, mais si une récession se concrétise, les bénéfices devraient plutôt diminuer. Cela se reflète dans les résultats du troisième trimestre qui font état d’une légère baisse des revenus, malgré une solide croissance annualisée du PIB réel de 4,9 % pour le trimestre. De plus, les valorisations boursières actuelles demeurent élevées, quelle que soit la mesure utilisée. Par conséquent, l’asymétrie des résultats se démarque. En cas d’atterrissage brutal, les actions pourraient subir des baisses importantes, tandis que même en cas d’atterrissage en douceur, le potentiel de hausse pourrait être limité.

Au sein de l’indice S&P 500, les titres technologiques à grande capitalisation qu’on appelle les « sept magnifiques » ont généré tous les gains depuis le début de l’année et représentent maintenant près de la moitié de l’indice de croissance Russell 1000, contre 12 % il y a dix ans. Au cours de cette phase de fin de cycle, les actions à petite capitalisation ont aussi inscrit des rendements inférieurs, ce qui est conforme aux faibles résultats du dernier sondage de la NFIB mené auprès des petites et moyennes entreprises. La hausse des salaires et des coûts d’exploitation pèse sur les marges bénéficiaires, les intérêts payés sur les prêts ayant atteint 10 % en octobre (voir le graphique 3), soit leur plus haut niveau depuis le début des années 2000. L’effet de la hausse des taux sur les sociétés se fait toujours sentir, mais il devient de plus en plus évident.

Graphique 3 : Les coûts d’intérêt ont des répercussions importantes

Le graphique illustre la tendance des coûts d’intérêt croissants auxquels font face les emprunteurs, comme l’indique le sondage de la NFIB sur les taux d’intérêt réels payés sur les prêts à court terme. De 1989 à 2023, la série est passée d’un creux historique en 2020 à son plus haut niveau depuis 2006.

Sources : National Federation of Independent Business (NFIB) et Macrobond

En revanche, les rendements obligataires ont été faibles pour une troisième année consécutive, soit une période sans précédent, en raison d’une forte hausse des taux, qui sont maintenant revenus à leurs moyennes à long terme. En octobre, les taux des obligations américaines à 10 ans ont dépassé les 5 %, les taux réels s’établissant à 2,1 %, soit le niveau le plus intéressant en plus de 15 ans, ce qui est favorable par rapport aux ratios bénéfice/cours des actions (voir le graphique 4). L’indice des obligations universelles FTSE au Canada et l’indice général des obligations américaines Bloomberg affichaient respectivement un rendement de 5,1 % et de 6,5 % à la fin d’octobre, soit une hausse importante par rapport à environ 1 % il y a quelques années. Même si les investisseurs peuvent évaluer eux-mêmes si les taux d’intérêt augmenteront ou diminueront à partir de maintenant, il est vrai que les taux obligataires sont plus intéressants aujourd’hui qu’ils ne l’étaient auparavant et qu’ils offrent un plus grand potentiel de gains en capital, surtout en cas de repli. Les données récentes, notamment sur le marché américain de l’emploi, montrent que la demande excédentaire est en train de revenir à un niveau équilibré, et que l’écart entre la demande et l’offre de main-d’œuvre a diminué de moitié depuis son sommet. Une hausse modeste des renouvellements de demandes de prestations d’assurance chômage donne à penser qu’il est de plus en plus difficile de trouver des emplois. Compte tenu de ces facteurs, nous sommes de plus en plus prudents à l’égard des actifs risqués, y compris les actions à petite capitalisation, et plus optimistes à l’égard des obligations à l’approche de la fin de l’année.

Graphique 4 : L’écart entre les taux obligataires et les ratios bénéfice/cours rétrécit

Le graphique 4 montre le taux des obligations du Trésor américain à 10 ans par rapport au ratio bénéfice/cours de l’indice S&P 500 à partir de 1995. Depuis 2002, le ratio bénéfice/cours de l’indice S&P 500 a nettement surpassé le taux des obligations du Trésor à 10 ans. Compte tenu de la récente flambée des taux obligataires, ces deux séries sont maintenant presque alignées.

Sources : Département des finances des États-Unis, I/B/E/S et Macrobond

 

Marchés financiers

Octobre a été un autre mois difficile pour les marchés, les actions et les titres à revenu fixe ayant tous deux fléchi. L’horrible attaque du Hamas contre Israël au début du mois a soulevé des préoccupations au sujet de l’élargissement du conflit au Moyen-Orient et des risques géopolitiques élevés. Toutefois, l’incidence directe de cette situation sur le marché semble limitée jusqu’à présent, des efforts étant déployés pour limiter une escalade généralisée dans la région. L’effet sur le pétrole et les valeurs refuges, comme l’or, a été généralement limité; les premières remontées de courte durée ont été suivies d’une baisse des prix, le niveau n’ayant été que légèrement plus élevé à la fin du mois.

Au Canada, les taux d’intérêt à 2 ans ont reculé de 16 pb et ceux à 10 ans ont augmenté de 5 pb, ce qui s’est traduit par un gain de 0,37 % pour l’indice des obligations universelles FTSE Canada. Aux États-Unis, les taux des obligations du Trésor à 10 ans ont bondi de 33 pb au cours du mois, inscrivant une hausse pour un sixième mois d’affilée et clôturant le mois d’octobre à 4,93 %. Cette montée des taux a été attribuable à de solides indicateurs économiques, comme le rapport sur le PIB du troisième trimestre. La hausse des taux a contribué à la baisse des marchés boursiers pour le troisième mois consécutif, une tendance qui n’avait pas été observée depuis mars 2020. L’indice S&P 500 a reculé de 2,1 % et l’indice composé S&P/TSX, de 3,2 %.

Stratégie de portefeuille

Le marché s’ajuste toujours à la nouvelle réalité des taux d’intérêt plus élevés (et réagit très favorablement lorsque les taux baissent). La trajectoire des actifs risqués dépend fortement du scénario économique en cours. Les États-Unis tiennent le coup grâce à une politique budgétaire énergique. Cependant, plus les taux d’intérêt restent élevés longtemps, plus le risque d’un atterrissage brutal est grand. Dans ce contexte, les marchés boursiers semblent s’attendre à un résultat très optimiste. Par conséquent, dans les fonds équilibrés, nous continuons de surpondérer les liquidités et de sous-pondérer les actions. Par ailleurs, les taux obligataires actuels sont de plus en plus intéressants, ce qui nous incite à évaluer la possibilité d’accroître notre pondération des obligations. Nos portefeuilles fondamentaux continuent de privilégier les sociétés stables et défensives, car nous prévoyons une hausse de la volatilité sur les marchés boursiers. Les portefeuilles de titres à revenu fixe cherchent à étoffer leurs placements qui profiteront de la normalisation de la courbe des taux, et continuent de sous-pondérer les titres de créance, en prévision d’un élargissement des écarts de taux.

À l’approche de la fin du cycle, les taux d’intérêt élevés dominent à la fois le contexte macroéconomique et celui des placements. Nous demeurons à l’affût des risques croissants alors que l’année tire à sa fin.